La lâcheté de certains, la bêtise d’autres, et la trahison des derniers a conduit à une situation aberrante au Parlement européen. L’extrême droite – entendue comme étant les forces allant de la droite des libéraux conservateurs aux nationalistes radicaux – représente plus de 10 % de l’ensemble des députés européens. Mais alors que toutes les sensibilités politiques sont parvenues à s’entendre (libéraux fédéralistes, libéraux antifédéralistes, libéraux-conservateurs, sociaux-démocrates, extrême gauche, extrême gauche « verte ») – même avec une très faible force numérique, comme les Verts qui possèdent à peine 50 députés –, la centaine de députés d’extrême droite se retrouve aujourd’hui sans aucun groupe politique.
Marine Le Pen, en se soumettant au système et en rejetant les nationalistes et patriotes intègres, avait mis fin à l’Alliance européenne des mouvements nationaux (AEMN). Mais, malgré ses nombreuses compromissions, elle avait été incapable de créer un groupe. Pire encore : par ses magouilles politiciennes, en poussant une députée de son propre parti à la démission, elle avait permis au Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni (UKIP, United Kingdom Independence Party) de Nigel Farage de faire survivre l’Europe de la liberté et de la démocratie directe (ELDD).
Handicapé par le départ du parti indépendantiste de la Ligue du Nord – qui pensait créer un groupe avec le Front national –, et des députés des Vrais Finlandais, du Parti politique réformé batave et du Parti du peuple danois, qui avaient rejoint le groupe libéral antifédéraliste Conservateurs et réformistes européens (CRE), pertes accrues par la non-réélection de Philippe De Villiers pour le Mouvement pour la France (MPF (Mouvement pour la France) comme des députés du LAOS grec, Nigel Farage avait obtenu l’inscription à l’ELDD du Mouvement 5 étoiles italien. Outre la députée ex-FN Joëlle Bergeron, ses 24 députés propres et les 17 Italiens, l’UKIP avait rallié les deux députés des Démocrates suédois, une élue d’Ordre et Justice (Lituanie) et le député du Parti des citoyens libres de la République (Tchéquie).
Le groupe possédait largement plus que les 25 députés minimum requis, mais ne disposait par contre que de députés venant de sept pays, ce qui est le minimum. Le départ d’Iveta Grigule – dont les raisons n’ont pas été établies clairement –, députée lettone de l’Union des verts et des paysans (ZZS, Zaļo un Zemnieku savienība) a mis fin à l’existence du groupe, dont la dissolution a été prononcée officiellement hier.
Le FN et l’UKIP, arrivés tous deux en tête des suffrages dans leurs pays en mai dernier, siégeront donc désormais ensemble parmi les non-inscrits, se partageant le maigre temps de paroles des députés ayant été incapables de former un groupe. Le Parlement européen compte désormais cent non inscrits : plus d’un député sur huit.
Cette situation est d’autant plus dommageable, qu’au-delà de l’incompétence qu’elle laisse apparaître, elle rendra la voix – extrêmement assourdie – des opposants à la nouvelle commission totalement inaudible.