Improvisation
Rarement leur République ne sera apparue autant le régime de l’improvisation, de l’amateurisme, de l’esprit partisan, de la combinazione. Les électeurs sont appelés aux urnes les 22 et 29 mars pour élire des conseillers départementaux et des milliers de politiciens, laissant peu de doute sur leurs motivations, se sont portés candidats alors même que ni les futurs élus ni les électeurs ne savent de quels pouvoirs disposeront les futurs élus départementaux.
À dix jours des élections, les députés viennent seulement d’adopter en première lecture un texte à ce sujet. Il doit désormais être examiné par les sénateurs avant de revenir devant les députés pour être adopté définitivement.
Ce projet de loi sur la répartition des compétences entre collectivités locales a été voté par 306 députés (PS, EÉLV, PRG – à l’exception de Jean-Pierre Maggi qui a voté contre –) ; 238 se sont prononcés contre (UMP, UDI, PC/FG, ainsi que les 6 non-inscrits, dont la députée FN).
Une réforme qui ne change rien
Cette réforme territoriale devait être une « révolution ». Le gouvernement, et tout particulièrement Manuel Valls, avait fait de cette réforme l’un des projets essentiels du quinquennat de François Hollande.
« Je ne reculerai pas, nous ne reculerons pas, sur la suppression des conseils généraux à terme. […] Cette réforme va se faire, et elle doit se faire […] malgré tous les conservatismes »
avait prétendu leur premier ministre en avril 2014.
Moins d’un an plus tard, le constat est accablant : le gouvernement a capitulé sur quasiment tous les sujets. Les menaces de ses « alliés » radicaux l’ont conduit à annoncer le maintien d’au moins tous les départements ruraux – la majorité. Les députés ont achevé le travail de déconstruction du texte.
La réforme, qui va coûter des centaines de millions d’euros, n’apportera aucun changement notable. Les départements conserveront la plupart de leurs attributions et continueront à exister dans le « mille-feuille territorial » entre les intercommunalités et les régions, aux côtés des communes, des grandes régions européennes, des régions de défense, des académies, etc.
Contrairement aux prétentions du gouvernement, les « conservatismes » ont gagné : ils ont imposé d’abord que le gouvernement renonce à la suppression des conseils généraux, puis, au Parlement, ils ont voté le maintien de la plupart des prérogatives des anciens conseils généraux. Les conseils départementaux qui les remplacent gardent la plupart de leurs compétences : ils continueront à gérer les collèges et conservent la charge de la voirie, soit quelque 380 000 kilomètres de route notamment pour le projet actuellement adopté, qui devrait être nettement remanié par le Sénat.