Comme c’était prévisible, le premier tour des élections municipales a été marqué par une très forte abstention (55,36 % des inscrits). C’était en effet une pure folie de maintenir ce scrutin alors même que le coronavirus faisait chaque jour davantage des ravages dans notre pays et que le chef de l’Etat, le jeudi 12 mars, puis le Premier ministre, la veille du scrutin, avaient tout à coup adopté un ton martial et imposé des mesures se voulant radicales : d’abord la fermeture des crèches, des écoles, des collèges, des lycées et des universités à partir du lundi 16 mars et pour une durée indéterminée, puis la fermeture des bars, des restaurants et des cafés à partir du samedi 14 mars à minuit. Ainsi que l’interdiction des rassemblements de plus de 100 personnes et des cérémonies dans les lieux de culte.
Autrement dit les offices religieux dominicaux étaient interdits mais en revanche on pouvait, et même on devait, voter. On voit à quel point la démocratie est une religion, comment la sainte urne est une véritable idole qui fait perdre tout bon sens, toute morale, tout souci véritable de la santé et de la vie des Français. Il semble que le jeudi 12 mars Emmanuel Macron ait été tenté de reporter les municipales mais devant le refus très net de l’opposition, et singulièrement du président du Sénat, le catastrophique Gérard Larcher, qui aurait parlé de « coup d’Etat institutionnel », il ait finalement reculé. Ce qui est le contraire de l’attitude d’un chef, d’un homme d’Etat qui doit trancher, prendre des décisions, quitte à indisposer, quitte à se mettre à dos une partie de la classe politique ou des “élites”.
Comment comprendre en effet que l’on empêche quasiment les gens de se déplacer, de vivre normalement, de se rendre à un culte public et maintenir parallèlement des élections ? La vérité, c’est que les dirigeants français, pendant trop longtemps, n’ont pas pris la mesure de la gravité de la situation. Alors qu’ils étaient pourtant informés de ce qui se passait en Chine (depuis décembre 2019 !), puis en Italie (depuis un mois !), aucune mesure n’était prise dans notre pays pour protéger les Français. On voyait même il y a peu Emmanuel et Brigitte Macron se rendre ostensiblement au théâtre alors même que l’Italie prenait déjà des mesures sévères face à la pandémie. Et que l’ex-ministre de la Santé, Agnès Buzyn, minimisait les risques, se moquait des Italiens et envoyait à la Chine des masques qui nous auraient été aujourd’hui ô combien précieux et qui nous manquent cruellement !
Cette faillite morale et politique est l’effrayant symptôme et le parfait résumé de politiciens lamentables et successifs qui n’ont eu de cesse de supprimer ces dernières décennies toutes les protections, toutes les frontières, morales et physiques, qui protégeaient notre peuple et notre pays. Macron et ses prédécesseurs à l’Elysée n’ont eu en effet de cesse de vanter et de mettre en œuvre la totale liberté de circulation aux hommes, aux capitaux et aux marchandises, de célébrer l’Union européenne, l’Espace Schengen. Voilà que tout à coup, dans une allocution télévisée de vingt minutes le lundi 16 mars au soir, Macron annonce pour le mardi midi la fermeture soudaine des frontières de l’Union européenne et de l’Espace Schengen. Mais il est bien tard. Il est trop tard, dès lors que le virus circule déjà très fortement dans notre pays.
Macron fut un des premiers à se moquer de ceux qui voulaient ériger une France forteresse, à construire un pays qui se barricade. Jeudi dernier, le 12 mars, il mettait encore en garde contre « le repli nationaliste » (il faut le faire !), condamnant ceux qui pensent que le virus s’arrête aux frontières nationales. Sauf que ce n’est pas le virus qui franchit les frontières, ce sont les hommes qui en sont porteurs et qui viennent en France.
Au fil des décennies, on n’a eu de cesse de démanteler de manière systématique, criminelle, toutes les protections économiques, politiques, morales, institutionnelles, de vanter le nomadisme, le sans-frontiérisme, le cosmopolitisme. il y a quelques années encore, au cours d’un dîner du CRIF, on s’en prenait avec une vigueur inouïe au retour du protectionnisme et aux tenants du protectionnisme économique. Et pourtant si nous produisions français avec des Français, si nous étions totalement auto-dépendants sur le plan alimentaire, sur le plan des industries, des savoirs et des savoir-faire, comme la France l’était naguère, nous n’en serions pas là aujourd’hui. Les délocalisations, le nomadisme généralisé, l’immigrationnisme forcené, l’européisme bruxellois, l’amoralisme systématique nous ont ruinés, dépossédés, fragilisés.
Et voilà que tout à coup, quand le drame arrive, quand la catastrophe se fait jour, on redécouvre, sans doute de manière hypocrite et passagère, les vertus des frontières, de la sédentarité, des protections. On a voulu et construit une France et une Europe en état d’invasion libre, on a voulu construire un marché libre, on a fait du libre-échangisme un dogme et des critères de Maastricht une obligation morale, et voilà que tout part en pièce détachée, qu’un virus montre à quel point tout cet échafaudage était fragile, que le décor était en carton pâte et que rien ne tient debout. Ce n’est pas un hasard si les dirigeants les plus européistes, les plus ouverts aux migrations et au libéralisme libertaire que sont Angela Merkel et Emmanuel Macron doivent gérer en urgence une crise qui manifestement les dépasse et les conduit à prendre, contraints et forcés, des mesures et des décisions diamétralement opposées à tout ce qu’ils avaient dit, déclaré, professé, développé jusque-là.
Feu Louis Pauwels avait naguère parlé d’un sida mental. Le coronavirus est un virus effrayant, et nous ne sommes probablement qu’au début de cette pandémie mondiale dont nous ne connaissons toujours pas avec certitude les causes et dont il est impossible aujourd’hui de prévoir l’exacte étendue, non plus que les conséquences, qui seront de toute façon dévastatrices sur le plan sanitaire, humain et économique. Mais il est un virus plus grave encore, c’est le virus mental, spirituel. Celui qui refuse obstinément de voir la réalité en face, qui impose le déni du réel. Celui qui méprise Dieu et la nature, qui fait fi des lois divines et de la morale naturelle. Celui qui organise le monde, la société, l’Etat comme si Dieu n’existait pas. Celui qui déconstruit rageusement ce que des siècles de civilisation chrétienne et européenne ont construit patiemment, laborieusement, graduellement. Celui qui rejette l’ordre moral et promeut un désordre organisé. Celui qui conduit à l’abîme et au chaos. Au chaos social, moral et aujourd’hui sanitaire que nous connaissons.
Si au moins la dramatique épreuve que nous connaissons actuellement pouvait nous ramener à l’essentiel, et à nous faire recouvrer le bon sens et l’ordre des priorités, alors de ce terrible malheur, de cette infortune inédite et inouïe pourrait peut-être, pourrait enfin sortir quelque chose de bon. Telle est notre espérance dans la nuit et les ténèbres qui aujourd’hui recouvrent tôt et alors que la mort et le malheur rôdent.
Que Dieu vous garde tous sous sa sainte et divine protection !
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RIVAROL.
Editorial du numéro 3416 de RIVAROL daté du 18 mars 2020