Dominique Strauss-Kahn est un rescapé. Les juges l’ont d’abord trouvé innocent d’avoir accepté 600 000 francs volés aux étudiants français dans le cadre de la Mutuelle nationale des étudiants de France (MNÉF) pour une « médiation ». Il n’avait pourtant participé à aucune réunion, signé aucun document, ne connaissait pas même les noms des représentants de l’autre partie. La MNEF avait fait appel, pour l’entrée de la CGE à son capital, à un cabinet spécialisé, en plus de son avocat d’affaires – payé lui 350 000 francs, toujours avec l’argent volé aux étudiants et aux contribuables, par an au forfait. Mais la justice républicaine et indépendante n’avait rien retrouvé à redire. Comme la plupart des oligarques du PS impliqués totalement dans les magouilles de la MNEF, il avait échappé à une condamnation.
Ce fut ensuite l’affaire de la cassette Méry, du nom du financier occulte du RPR, l’ancêtre de l’UMP, qui a donné lui Les Républicains (LR). En échange d’une « remise fiscale » de 160 millions d’euros à Karl Lagarfeld, il avait obtenu la cassette où Jean-Claude Méry avouait les détournements de fonds du RPR. Depuis, la cassette a disparu. Dominique Strauss-Kahn n’a jamais été condamné.
Ce furent ensuite les affaires de mœurs : les accusations de Piroska Nagy, « M. Strauss-Kahn a abusé de sa position pour entrer en relation avec moi. […] Je n’étais pas préparée aux avances du directeur général du FMI. […] J’avais le sentiment que j’étais perdante si j’acceptais, et perdante si je refusais », avait-elle déclaré. Il avait de plus utilisé ses fonctions ensuite pour trouver un poste. Cet avocat d’affaires avait été blanchi par un… cabinet d’avocats payé par le FMI – dont il était alors le patron – pour faire la lumière sur son comportement. Le conseil d’administration du FMI avait timidement reconnu « une grave erreur de jugement [sic] ».
Ce furent ensuite les accusations de viols de Nafitoussa Dialo qui ne se réglèrent pas devant un tribunal, mais en payant à la femme de ménage du Sofitel une très forte somme, puis celle de Tristane Banon – antérieure, mais rappelée à cette époque, les premières accusations n’ayant conduit à aucune réaction. Pour cette dernière, la justice a reconnu l’agression sexuelle, mais estima que les faits étaient trop anciens pour être jugés.
Hier, le tribunal correctionnel de Lille a rendu son verdict dans l’affaire dite du Carlton. Dans cet hôtel lillois, Dominique Strauss-Kahn et plusieurs de ses proches ont organisé à plusieurs reprises des orgies avec des prostituées. Les faits ne souffraient d’aucun doute : de la prostitution, des filles payées, un réseau, un appartement loué pour accueillir les prostituées, des choix de « filles », des gens en profitant, certainement doublement, en « consommant » et gagnant de l’argent. Le tribunal a pourtant réussi l’exploit de relaxer l’ensemble des quatorze protagonistes. Dans ce dossier, où a plané tous le long du dossier l’ombre de la franc-maçonnerie, certaines orgies se décidaient dans les loges, d’Israël, bien entendu, et des plus gros intérêts – outre le patron du FMI, un haut cadre de la police « nationale » (sic) était jugé avec d’importants entrepreneurs de la région. Mais pour tous ceux-là, les accusations sont tombées. René Kojfer semble payer pour les autres : 10 ans de prison et 1,5 million d’amendes.
La loi est pourtant extrêmement claire : « Le proxénétisme est le fait, par quiconque, de quelque manière que ce soit d’aider, d’assister ou de protéger la prostitution d’autrui ; De tirer profit de la prostitution d’autrui, d’en partager les produits ou de recevoir des subsides d’une personne se livrant habituellement à la prostitution ; D’embaucher, d’entraîner ou de détourner une personne en vue de la prostitution ou d’exercer sur elle une pression pour qu’elle se prostitue ou continue à le faire ».
Pas pour les juges de Lille qui ont dû être conseillés par le même cabinet d’avocats d’affaires qui a « blanchi » Dominique Strauss-Kahn au FMI, qui a négocié le silence de Nafitoussa Diallo, et qui a conseillé les juges des affaires MNEF et Méry. Ni responsable, ni coupable, Dominique Strauss-Kahn fait encore mieux que Laurent Fabius.