On me demande de vous parler de cette grande inconnue de la Seconde Guerre mondiale : la Waffen SS. Il est quand même assez surprenant qu’une telle organisation, à la fois politique et militaire, qui comptait au plus fort de la guerre un million de combattants volontaires puisse continuer de passer inaperçue de nos jours.
Pourquoi ? Comment se fait-il qu’une aussi formidable armée de volontaires soit encore aujourd’hui virtuellement ignorée ou caricaturée ? Une armée qui était au cœur de la tempête de la plus titanesque lutte que le monde ait connu. La réponse pourrait bien être que le trait le plus saillant des Waffen SS était d’être composés de volontaires de trente pays différents.
Quelle cause les a réuni, et pourquoi ont-ils accepté de risquer leur vie ?
Était-ce un phénomène uniquement allemand ? Au début, oui. Au départ, les Waffen SS ne totalisaient pas plus de deux cents hommes. Mais les effectifs ont régulièrement cru jusqu’en 1940, puis il y a eu une accélération avec l’arrivée, lors d’une deuxième phase, de SS d’ethnies germaniques réparties un peu partout en Europe, et de volontaires d’Europe du Nord-Ouest.
Et puis, en 1941, au moment du choc avec l’Union soviétique, sont apparus les Waffen SS européens. Des jeunes des contrées européennes les plus éloignées se battaient ensemble sur le front de l’Est. On sait assez peu de choses sur les Waffen SS durant les années d’avant-guerre. Les Allemands eux-mêmes ont tardé à reconnaître leur caractère particulier.
Au départ, il n’y avait pas de SS, il y avait les SA « Sturmabteilung », trois millions d’hommes. Ils constituaient la base du Parti national-socialiste, mais la SA n’était absolument pas une armée. Leur principale fonction était de protéger les candidats du parti de la violence communiste. Une violence physique meurtrière, plus de cinq cents nationaux-socialistes ont été assassinés apr les communistes et des milliers gravement blessés. Les SA étaient des volontaires dans une organisation non gouvernementale, dès qu’Hitler est arrivé au pouvoir, il ne pouvait plus être question pour lui de s’appuyer sur eux.
Hitler se devait de travailler dans le cadre du système qui l’avait amené au pouvoir. Mais il partait handicapé. Il lui fallait faire face aux citadelles de l’administration issues de l’ancien régime. Encore au moment où la guerre éclatait en 1939, 70 pour cent de la bureaucratie allemande avait été mise en place par l’ancien régime et n’appartenait pas au parti. Il ne pouvait pas non plus compter sur la hiérarchie ecclésiastique. À la fois les grandes entreprises et le parti communiste étaient hostiles à son programme. Par-dessus le marché, il y avait un chômage massif, jamais vu en Europe jusque-là avec six millions de chômeurs et une pauvreté endémique.
Les SA avaient permis de gagner les élections mais ils n’étaient pas capables de gouverner en outre l’armée leur était farouchement hostile. Hitler était devant un cruel dilemme : que faire de ces millions de partisans qui l’avaient porté au pouvoir ? Il ne pouvait pas les abandonner.
L’armée était une structure redoutable, bien que réduite à 100 000 hommes suite au dictat de Versailles, elle exerçait une grande influence dans les affaires publiques, c’était une caste privilégiée dont était issu le président de l’Allemagne, le maréchal von Hindenburg, presque tous les officiers appartenaient à la haute société.
Il était impossible à Hitler de contrer frontalement l’armée. Il avait été élu démocratiquement et il ne pouvait pas faire comme Staline, passer la hiérarchie militaire par les armes pour les remplacer par des commissaires politiques de confiance. De telles méthodes ne pouvaient être employées en Allemagne, d’autant que contrairement à Staline, Hitler étaient entourés d’ennemis au plan international. Pour arriver au pouvoir, il s’était adressé directement au peuple, sans passer par les partis de l’establishment, il prônait l’intégrité raciale et la reprise en main par le peuple de sa destinée : des principes qui faisaient tellement s’étouffer de rage la juiverie internationale qu’elle lui avait officiellement déclaré la guerre en 1933 [ « Une » du Daily Mail du 24 mars 1933].
Contrairement à ce qu’on pense, Hitler avait des pouvoirs limités et était assez isolé, comment cet homme a réussi à surmonter tous ces obstacles défie l’entendement, seul son exceptionnel génie peut expliquer qu’il a survécu à ces premières années de son arrivée au pouvoir. La sourde confrontation entre les SA et l’armée était en train d’atteindre son paroxysme. Ernst Röhm son vieux compagnon de route et chef des SA aurait bien aimé suivre l’exemple de Staline, mais c’est finalement lui qui perdra la vie que ce soit par suicide ou lors d’une exécution sommaire, de même que quelques-uns de ses proches, et les SA ne joueront plus aucun rôle politique majeur.
Pour prendre le relais, les seuls SS disponibles en Allemagne se trouvaient à la chancellerie, ils constituaient la garde rapprochée d’Hitler : en tout 180 SS. Des jeunes aux qualités exceptionnelles mais sans aucun rôle politique, ils devaient simplement garder la chancellerie et présenter les armes aux dignitaires en visite. C’est de ce groupe minuscule que devait jaillir quelques années plus tard une armée d’un million d’hommes, une armée d’une valeur sans précédent dont l’appel résonnait dans toute l’Europe.
Pour l’heure, cette poignée d’hommes était insuffisante pour soutenir son programme social révolutionnaire face à une armée composée d’aristocrates et qui, désormais, avec l’élimination des SA, avait le champ libre. [voir en détail le miracle économique et social d’Hitler https://www2.jeune-nation.com/culture/comment-hitler-a-resorbe-le-chomage.html. De même sa conception de la révolution nationale-socialiste dans ses discours de campagnes électorales https://www2.jeune-nation.com/culture/le-discours-souche-de-la-campagne-electorale-dadolf-hitler-en-1932.html ou son discours du 10 décembre 1940 https://www2.jeune-nation.com/culture/la-nuit-de-cristal-une-piece-historique-au-dossier.html avec le concept de coopération de classe à l’intérieur d’une nation]
Hitler se rendait bien compte que pour que son programme de réformes économiques et sociales se poursuive et s’enracine, il lui fallait un puissant levier, du genre qui impose le respect. Évitant de prendre l’armée de front, il a adroitement commencé à renforcer la SS. Hitler avait besoin de la SS parce que c’était avant tout un homme politique, pour lui, la guerre était le dernier recours. Il cherchait plutôt à convaincre les gens, à obtenir leur fidélité, en particulier celle des jeunes générations. Il savait que les vieux galonnés l’attendraient à chaque tournant.
Pour ne pas alarmer l’armée, Hitler a étoffé la SS en tant que force chargée du maintien de l’ordre. Il existait bien sûr déjà une force de police en Allemagne, mais là aussi, Hitler n’était pas très sûr de sa loyauté. Les 150 000 policiers avaient été nommés par le régime de Weimar. Hitler avait besoin de la SS pas seulement pour dépister et étouffer les complots, mais d’abord et avant tout pour protéger ses réformes. En plus du renforcement de la première Leibstandarte, d’autres unités ont vu le jour comme les régiments Deutschland et Germania.
L’armée a essayé d’entraver le recrutement de la SS. Hitler a contourné l’obstacle en confiant ce recrutement au ministère de l’intérieur et non à celui de la guerre. L’armée a répliqué en imposant des critères de nature à décourager les candidats : les soldats devaient s’engager pour quatre ans, les sous-officiers pour 12 et les officiers pour 25. Mais malgré ces durées d’engagements délibérément allongés, les jeunes se pressaient en masse pour entrer à la SS, plus qu’on ne pouvait en accepter.
Les jeunes pressentaient que la SS était la seule force armée à représenter leurs propres idées. Cette nouvelle formation captivait l’imagination du public. Sanglés dans des uniformes noirs impeccables, les SS attiraient de plus en plus de jeunes. Il a fallu deux années – de 1933 à 1935 – et une bataille de tous les instants pour déjouer les tracasseries de l’armée, pour mettre sur pied une force de 8 000 hommes.
À l’époque, on les appelait simplement SS. Ce n’est qu’après la campagne de France en 1940 qu’on leur a officiellement donné le nom de « Waffen SS ». Mais 8 000 hommes dans un pays de 80 millions d’habitants, ça ne permet toujours pas d’aller bien loin. Hitler a dû concevoir encore un nouveau stratagème pour contourner l’armée. Il a créé une unité de garde, la Totenkopf . Il s’agissait bien de SS déguisés, mais leur fonction officielle était d’assurer la garde des camps de concentration.
Camps de concentration, le mot est lâché, de quoi s’agissait-il ? C’étaient simplement des camps de travail dans lesquels on plaçait les communistes irréductibles. Ils étaient bien traités parce qu’on pensait que tout ou tard, ils seraient gagnés par le patriotisme. Il y avait deux camps avec un total de 3 000 détenus. Trois mille sur les six millions de membres du parti communiste porteurs de la carte. Cela représente un pour deux mille. Encore au seuil de la guerre, il y avait moins de 10 000 détenus.
Les jeunes qui s’engageaient dans la SS subissaient un entraînement comme dans aucune autre armée dans le monde. L’instruction militaire et théorique était intensive, mais c’est surtout l’entraînement physique qui était le plus rigoureux. Leur niveau sportif était excellent, chacun d’eux aurait pu participer aux jeux olympiques avec honneur. L’endurance physique des SS qui a tellement étonné le monde sur le front russe venait de là.
Il y avait aussi une formation idéologique qui ne le cédait en rien à l’entraînement physique. Les jeunes devaient savoir pourquoi ils se battaient et quelle Allemagne était en train de ressusciter. On leur montrait comment l’Allemagne avait été réunifiée par la réconciliation de classe et par le retour des terres allemandes perdues. On leur a fait prendre conscience de leurs liens de parenté avec toutes les autres ethnies germaniques vivant à l’étranger, en Pologne, en Russie et ailleurs en Europe, on leur apprenait que toutes ces ethnies faisaient un.
Les jeunes SS étaient formés dans deux écoles militaires, l’une à Bad Tölz, l’autre à Braunschweig. Ces écoles ne ressemblaient en rien aux sinistres baraquements du passé. Elles combinaient l’esthétique aux dernières technologies et étaient situées au milieu de domaines magnifiques à la campagne.
Hitler n’était pas favorable à la guerre, en particulier en Europe de l’ouest. Il n’imaginait même pas que des SS pourraient être engagés dans de telles guerres. Les SS étaient avant tout une force politique. Il considérait que les pays de l’ouest comme des entités culturelles qui pouvaient être fédérées mais certainement pas conquises, il avait la conviction qu’une guerre à l’ouest serait une guerre civile sans gagnant.
Il n’en allait pas de même avec l’Union Soviétique où l’internationalisme avait remplacé le nationalisme. Les communistes n’ont jamais visé à servir les intérêts de la Russie, le communisme ne se limitait pas à acquérir telle ou telle parcelle de territoire, il visait à la domination mondiale.
C’était là un facteur entièrement nouveau. Seul parmi les autres dirigeants du monde, Hitler voyait le communisme soviétique comme une menace grave et imminente pour l’ensemble des nations, il était d’autant moins intéressé par une guerre à l’ouest qu’il avait parfaitement conscience qu’il ne pourrait pas gagner sur deux fronts. Mais au lieu de laisser Hitler combattre le communisme, les Alliés ont pris la fatidique décision de l’attaquer. [ Sur la diplomatie allemande avant-guerre, voir « ce que le monde n’a pas voulu » https://www2.jeune-nation.com/culture/ce-que-le-monde-na-pas-voulu-les-offres-de-paix-dhitler-entre-1933-et-1939.html ]
La guerre à l’ouest de 1939 était un défi à la raison. Il s’agissait ni plus ni moins que d’une guerre civile entre ceux qui auraient dû s’unir. C’était une monstrueuse stupidité. Les jeunes SS s’étaient formés pour mener la révolution nationale-socialiste, dans les cinq ou dix ans, ils devaient remplacer ceux qui avaient été mis en place par l’ancien régime, mais avec le début de la guerre, il n’était pas possible pour eux de rester les bras croisés. Ils se sentaient appelés à combattre avec leurs jeunes compatriotes pour défendre leur pays, et même à le défendre mieux que les autres. C’est la guerre qui a changé la SS d’une force politique intérieure en une armée combattant à l’étranger, puis en une armée supranationale.
Nous voici à présent en1939, au seuil de la guerre en Pologne avec toutes ses conséquences d’une portée qu’on ne devinait pas.[ sur la diplomatie américaine en Europe et en Pologne pour envenimer la situation et pousser à la guerre contre l’Allemagne, voir : https://www2.jeune-nation.com/culture/la-campagne-du-president-roosevelt-pour-pousser-a-la-guerre-en-europe-2.html ].
Les Anglais faisaient tout pour dresser la Pologne et les Polonais contre l’Allemagne. De tous les crimes de la Seconde Guerre mondiale, personne n’a jamais entendu parler des massacres en règle qui se sont déroulés en Pologne juste avant la guerre. J’ai en ma possession des documents précis qui en attestent : des milliers d’Allemands, femmes et enfants ont été massacrés dans des conditions atroces par une populace chauffée à blanc par les médias. Les photos de ces boucheries sont insupportables. Hitler décida de mettre fin à la tuerie et de se porter au secours des victimes.
La campagne qui s’engage en Pologne va révéler un autre trait particulier de cet homme : son exceptionnel génie militaire. Toutes les campagnes victorieuses du Troisième Reich ont été conçues et dirigées par Hitler en personne, pas par son état-major général. Il a été une source d’inspiration pour ses plus brillants généraux qui ont tant excellé dans les campagnes successives.
Pour la Pologne, le haut-commandement avait envisagé une offensive le long de la Baltique en direction de Dantzig, un plan voué à l’échec. Au lieu de ça, Hitler a inventé le Blitzkrieg – la Guerre éclair – faisant tomber Varsovie en un rien de temps. C’était la première apparition des SS sur un front et leurs exploits ont surpris le monde entier.
La campagne éclair a vu trois régiments SS à l’œuvre : Leibstandarte, GrossDeutschland et Germania . On comptait aussi un bataillon motocycliste, un corps du génie et une unité de transmission.
En tout, c’est une force assez réduite mais cohérente et autonome de 25 000 hommes qui constituait le fer de lance de la campagne. Après avoir fait sauter le verrou en Silésie, Sepp Dietrich, seul à la tête de la Leibstandarte, a coupé la Pologne en deux en l’espace de quelques jours. Avec moins de 3 000 hommes, il a défait 15 000 Polonais qui lui faisaient face et fait 10 000 prisonniers. De tels succès ne s’obtenaient pas sans perte.
La seconde campagne, en France, a également été foudroyante. Les forces Franco-britanniques s’étaient ruées en Hollande et en Belgique pour contrer l’avance allemande mais elles ont été prises à revers à Sedan. Pratiquement en quelques jours, tout était perdu.
On prétend qu’Hitler n’était pour rien dans cette opération, qu’elle était entièrement l’œuvre du général von Manstein. C’est totalement faux. Von Manstein en avait effectivement eu l’idée, mais quand il l’a soumise à l’état-major il s’est fait réprimander, a été rétrogradé et limogé à Dresde. L’état-major n’avait pas même pas songé à porter l’incident à l’attention d’Hitler. De son propre-chef, Hitler a mis sur pied un plan de campagne similaire et a défait les forces franco-britanniques. Ce n’est qu’en mars 1940 que von Manstein est entré en contact avec Hitler.
Hitler a aussi conçu la campagne des Balkans et celle de Russie. Les rares fois où Hitler a laissé l’état-major suivre son idée, comme à Koursk, cela s’est traduit par une défaite.
Pour la campagne de Pologne, Hitler ne s’est pas basé, à l’inverse de ce que s’apprêtait à faire son état-major, sur des manuels de stratégies vieux de 50 ans, il avait son propre plan d’encerclement rapide en tenaille. En huit jours, la guerre était gagnée en dépit du fait que la Pologne est aussi vaste que la France.
À quel prix ces exploits, on a du mal à se le représenter, mais sur environ 1 million de SS, 352 000 ont été tués auxquels s’ajoutent quelque 50 000 portés disparus. Un chiffre qui donne le vertige. Quatre cents mille prélevés sur la fine fleur de la jeunesse européenne. C’est sans hésitations qu’ils se sont sacrifiés pour leur cause, ils savaient qu’ils devaient donner l’exemple. Ils étaient en première ligne pour défendre leur pays et leur idéal.
Dans la victoire ou dans la défaite, les Waffen SS cherchent toujours à être les meilleurs représentants de leur peuple. Ils étaient une émanation de la force démocratique : des gens qui s’unissent de leur plein gré. L’urne n’est pas la seule incarnation d’un tel assentiment, il y a aussi le cœur et l’esprit en action : les hommes de la Waffen SS ont fait un plébiscite de fait et ils ont reçu du peuple allemand, fier d’eux, amour et respect. C’est cette extraordinaire motivation qui a fait des volontaires de la Waffen SS les meilleurs combattants du monde.
Leur idéal était trempé au feu de l’action. Ce n’étaient pas des politiciens de salon, c’étaient des hommes prêts au sacrifice de leur vie, des hommes qui portés par une extraordinaire fraternité d’armes, partaient toujours les premiers au combat. Cette fraternité d’armes était la caractéristique la plus saillante des SS : leur chef était l’un des leurs, un camarade parmi les camarades.
Sur le front, c’est l’entraînement physique des SS qui faisait la différence. Les officiers subissaient le même entraînement rigoureux que les hommes du rang. Les officiers et les simples soldats participaient aux même événements sportifs et c’est le meilleur, sans considération de grade, qui gagnait. C’est ce qui créait cet esprit de corps qui irradiait toute la Waffen SS. Ce n’est que par le travail en commun d’hommes libres animés par un idéal supérieur qu’on pouvait unir l’Europe. Regardez le marché commun d’aujourd’hui, c’est un fiasco. Il n’y a pas d’idéal transcendant. Tout se résume à des chamailleries de boutiquiers sur le prix des tomates, de l’acier, du charbon et du lait en poudre. Une union féconde a besoin de se fonder sur quelque chose de plus élevé.
Il régnait entre les soldats et les officiers une relation d’égalité et de respect mutuel. La moitié des commandants de division sont morts au combat. La moitié. On n’a pas vu ça dans aucune autre armée du monde. L’officier SS prenait toujours la tête de ses troupes dans la bataille. J’ai été pris dans 75 combats au corps-à-corps, parce qu’en tant qu’officier SS, je devais être le premier au contact de l’ennemi. Les SS n’étaient pas envoyés au massacre par des commandants de l’arrière, ils suivaient leurs officiers avec une loyauté sans failles. Tous les officiers SS connaissaient leurs hommes et leur parlaient, recevant parfois des réponses les plus inattendues.
Après l’échappée de la poche de Tcherkassy, j’ai parlé à tous mes hommes, un par un, à l’époque, ils étaient des milliers. Pendant deux semaines, chaque jour, du matin au soir, je leur ai posé des questions et j’ai écouté leurs réponses. Il arrivait que des soldats un peu vantards reçoivent des médailles, alors que d’autres, héroïques mais moins bavards passaient à côté. J’ai parlé à chacun parce que je voulais savoir de première main ce qui s’était passé et ce qu’ils avaient fait. Pour être juste, il fallait que sache la vérité.
C’est en cette occasion que deux de mes hommes ont brusquement sorti leurs cartes de membre de la résistance belge. Ils m’ont dit qu’ils avaient pour mission de me tuer. Sur le front, ce n’est pas bien difficile de tuer quelqu’un dans le dos. Mais ils avaient été gagnés par l’extraordinaire esprit de corps des SS. C’est par l’exemple que les officiers SS obtenaient la fidélité de leurs hommes.
L’espérance de vie d’un officier SS au front n’excédait pas trois mois. Un lundi, sur le front en Estonie, j’ai reçu dix jeunes officiers fraîchement émoulus de Bad Töltz, le jeudi, un seul restait en vie et il était blessé [Bad Töltz, en Bavière, école militaire pour les officiers SS].
Dans les armées, en général, les officiers s’adressent à leurs hommes de supérieur à subordonné, rarement en tant que frères d’armes, en tant que frères partageant la même idéologie.
Dès 1939, les SS avaient forcé l’admiration et le respect de tous. Cela a permis à Hitler de demander qu’on augmente leurs effectifs. Les trois régiments devaient devenir des divisions. À nouveau, la hiérarchie militaire avait imposé des conditions d’admission drastiques. Les candidats ne pouvaient s’enrôler dans les SS que pour un minimum de quatre années de service actif. On pensait que personne ne prendrait le risque d’un tel engagement, mais de nouveau, on se trompait. Pour le seul mois de février 1940, on comptait 49 000 recrues. Les effectifs sont passés de 25 000 en septembre 1939 à 150 000 en mai 1940. Donc des 180 du tout début, leur nombre est passé à 8 000, puis à 25 000, ensuite, 150 000 pour finalement atteindre, contre toute attente, un million.
Hitler n’avait aucun intérêt à s’engager dans une guerre avec la France. Il y a été contraint.
Les 150 000 SS devaient participer aux opérations sous la direction de l’armée, on leur avait confié les missions les plus périlleuses en dépit d’un équipement plutôt médiocre. En 1940 la Leibstandarte ne disposait que de quelques blindés légers de reconnaissance. On avait fourni aux SS des roues, c’était à peu près tout. Mais rien qu’avec des camions et des motos, ils ont accompli des prouesses incroyables.
Les régiments Leibstandarte et Der Führer furent envoyés en Hollande sous la direction de Sepp Dietrich. Ils devaient traverser les canaux bataves. La Luftwaffe avait largué des parachutistes pour s’emparer des ponts loin en profondeur, à deux cents kilomètres en territoire adverse et il était vital qu’ils soient rejoints par les SS le plus rapidement possible. La Leibstandarte a alors réalisé un exploit sans précédent : parcourir 75 kilomètres en un jour et 215 kilomètres au total en seulement quatre jours. C’était inouï pour l’époque et le monde en était sidéré.
En un jour les canaux étaient franchis sur de frêles embarcations pneumatiques. Ici encore les pertes SS furent lourdes, mais grâce à leur héroïsme et leur rapidité, les forces allemandes parvenaient à Rotterdam en trois jours. Sans cette poussée éclair, les parachutistes auraient été écrasés.
En Belgique, les hommes du Der Führer faisaient directement face à l’armée française qui, tombant dans le piège de Sedan, se ruait vers Breda en Hollande. Là, on a pu voir comment une petite unité motivée pouvait mettre en déroute toute une armée. Il n’a fallu qu’un seul régiment SS et quelques unités de la Wehrmacht pour déséquilibrer toute l’armée française et la refouler de Breda à Anvers puis dans le nord de la France.
Les hommes du Der Führer et du Leibstandarte ont ensuite convergé vers les îles de la Zélande entre l’Escaut et le Rhin. Elles tombaient entre leurs mains en quelques jours. En un éclair, les hommes du Leibstandarte ont alors traversé la Belgique vers le nord de la France.
L’autre grand axe de progression des régiments SS se faisait en compagnie des panzers divisions de Guderian et de Rommel qui piquaient vers la Mer du Nord. Les troupes de Sepp Dietrich ont franchi les canaux français mais se sont retrouvées bloquées par l’ennemi en terrain marécageux, échappant de peu à l’anéantissement. Mais malgré de lourdes pertes en hommes et en officiers, la perte d’un bataillon de commandement, tous tués au combat, les Allemands atteignirent Dunkerque.
Hitler était fier d’eux.
La semaine suivante, Hitler les déployait le long de la Somme, et de là les SS se répandaient à travers la France. Une fois de plus, les SS se montraient les meilleurs combattants du monde. Sepp Dietrich et sa deuxième division SS, la Totenkopf , ont avancé si loin et si vite en trois jours qu’ils avaient perdu le contact avec le reste de l’armée. Ils ont atterri à Lyon, une ville qu’ils ont dû évacuer après la signature du traité d’armistice. Dietrchich et ses hommes, sur quelques camions, avaient réussi l’impossible.
La campagne de France était terminée, Hitler fit défiler les trois divisions SS à Paris. Berlin, de même fêta ces héros. Mais l’armée régulière était si jalouse, qu’elle ne cita pas un seul SS pour fait d’armes ou bravoure. C’est Hitler lui-même, dans une allocution au Reichstag, qui rendit hommage à l’héroïsme des SS. C’est à cette occasion que le nom de Waffen SS a été officiellement reconnu.
C’était plus qu’un simple changement de nom. Les Waffen SS devenaient de « race germanique », ouverts aux volontaires de tous les pays de souche germanique. C’était la prise de conscience que tous les peuples de l’Europe du nord-ouest étaient étroitement liés, les Norvégiens, les Danois, les Finlandais, les Néerlandais étaient tous de la même famille germanique. Ces peuples étaient très impressionnés par les SS, tout comme du reste, les Français.
En Europe des l’Ouest, les gens étaient admiratifs de ces unités d’élite allemandes au style à nul autre pareil : si deux éclaireurs SS arrivaient dans une ville sur leur moto, en avance sur le reste des troupes, ils faisaient d’abord un brin de toilette avant de se présenter, impeccables, devant les autorités. On ne pouvait qu’être impressionné.
L’admiration éprouvée par les jeunes Européens de souche germanique pour les SS n’était pas forcée, en Norvège, au Danemark, dans les Flandres, en Hollande, elle était sans bornes, l’attraction pour les SS était irrésistible. Ce n’était pas l’Europe qui trouvait un écho dans leurs âmes, c’était l’appel de la race. Ces jeunes s’identifiaient aux vainqueurs.
Pour eux, Hitler était un homme comme on n’en avait jamais vu. Hitler s’en est rendu compte et a eu l’idée remarquable de leur ouvrir les portes de la SS. Cela n’allait pas de soi, cela n’avait encore jamais été fait en Allemagne. Jusque-là, l’impérialisme allemand se limitait à ses exportations commerciales, sans aucune idée de créer « une communauté idéologique », un idéal commun avec ses voisins.
Et soudainement, voilà qu’au lieu des tractations commerciales, un homme leur offrait un grand idéal. Un idéal de justice sociale qu’ils avaient attendu pendant des années. Un grand Nouvel ordre au lieu du cosmopolitisme informe de la démocratie d’avant-guerre. C’est par milliers que les jeunes de Norvège, du Danemark, de Hollande et de Flandre ont répondu à l’appel d’Hitler pour porter l’uniforme SS. Pour eux, Hitler a créé la fameuse division Viking, destinée à devenir l’une des plus formidables des Waffen SS.
De son côté, l’armée régulière faisait toujours tout son possible pour dissuader les jeunes en Allemagne de rejoindre les SS. Dans ce contexte d’obstructionnisme domestique, il devenait d’autant plus compréhensible que la SS accueille avec faveur des hommes en dehors de l’Allemagne.
Les ethnies allemandes à l’étranger offraient un riche vivier de volontaires. Il y en avait des millions en Hongrie, en Roumanie et en Europe. Les victoires du Troisième Reich les avaient rendus fiers d’appartenir à la famille germanique. Hitler leur a ouvert les bras, il les voyait comme une ressource pour ses unités d’élite SS et comme un facteur important d’unification idéologique de tous les Allemands.
Ici encore la réponse fut enthousiaste et impressionnante. De toute l’Europe, 300 000 volontaires d’ascendance germanique se sont levés, dont 54 000 pour la seule Roumanie. Dans le contexte de l’époque, ces chiffres étaient remarquables. Il y avait bien des problèmes à surmonter. Par exemple, très peu des volontaires parlaient allemand. Leurs ancêtres s’étaient installés à l’étranger il y a longtemps, et ces hommes ne parlaient pas la même langue, leurs us et coutumes et leurs besoins étaient différents.
Où trouver des officiers pour toutes ces langues ? Comment harmoniser toute cette mosaïque ? Venir à bout de ces problèmes tenait du miracle, mais c’est ce qu’a réussi le programme d’assimilation des Waffen SS. Ce retour à la maison des différentes « tribus » constituait pour les Waffen SS la fondation de l’unité européenne. Les 300 000 volontaires étaient accueillis en frères et ils ont répondu en se montrant aussi dévoués, loyaux et héroïques que les SS du Reich.
En quelques années tout avait changé pour les Waffen SS. Les cantonnements et les centres d’instructions étaient plein à craquer. Les stricts critères d’admission s’appliquaient aussi aux volontaires étrangers. Ils devaient être les meilleurs en tout point, physiquement et mentalement. Ils devaient représenter la quintessence de la race germanique.
Ce racialisme du Troisième Reich a été délibérément caricaturé. Il n’a jamais été contre les autres races. C’était un racialisme pro germanique. Il se préoccupait de rendre la race allemande saine et vigoureuse. Hitler ne voulait pas que l’Allemagne produise des dégénérés par millions. De nos jours, l’alcoolisme et la drogue se répandent partout. Hitler se souciait d’avoir des familles en pleine santé, qui élève des enfants sains pour le renouveau d’une nation forte. Le racialisme allemand consistait en une redécouverte des vertus créatrices de sa propre race et de sa propre culture. Il s’efforçait à l’excellence, c’était une idée noble. Le racialisme national-socialiste ne s’érigeait pas contre les autres races, il agissait pour sa race propre, cherchant à la défendre et à l’améliorer et il souhaitait que les autres races fassent la même chose pour elles-mêmes.
En l’espace d’une année, les Waffen SS avaient réuni un grand nombre d’hommes du nord de l’Europe et des centaines de milliers d’hommes d’ethnies allemandes les Volksdeutsche. C’est alors que le conflit entre le communisme et le national-socialisme a éclaté au grand jour. Le conflit avait toujours existé à l’état latent. Dans Mein Kampf, Hitler avait clairement exposé ses intentions : « éliminer la menace mondiale du communisme », accessoirement, récupérer quelques territoires en Europe de l’Est. Personnellement, j’ai toujours fermement défendu les Russes, et j’ai finalement réussi à convaincre Hitler que les Allemands devaient vivre en bonne intelligence avec eux et non pas les soumettre. Mais d’abord, il fallait éradiquer le communisme. Durant les 21 mois du traité germano-soviétique de non-agression, Hitler a essayé de gagner du temps, mais les Soviétiques intensifiaient leurs actes d’agression de l’Estonie à la Bucovine.
À cet égard, certains extraits de documents soviétiques sont révélateurs. Le maréchal Vorochilov disait lui-même : « Nous avons maintenant le temps de nous préparer à devenir les bourreaux de ce monde capitaliste agonisant. Mais nous devons rester discrets. Les Allemands ne doivent pas se douter que nous nous préparons à la poignarder dans le dos quand ils seront occupés avec les Français, sans quoi, ils pourraient changer leur plan et nous attaquer nous. »
Dans le même document, le maréchal Shaposhnikov [?] écrivait : « La coexistence entre l’Allemagne d’Hitler et l’Union soviétique n’est que temporaire, nous ne la ferons pas durer très longtemps ». Le maréchal Timoshenko, quant à lui, ne se montrait pas si pressé : « N’oublions pas que notre matériel de guerre en provenance de nos usines en Sibérie ne sera pas livré avant l’automne ». Il écrivait cela début 1941. Un rapport du commissariat à l’industrie de guerre soviétique notait : la cadence maximale de production ne sera pas atteinte avant 1942. Le maréchal Zoukov faisait cet aveu extraordinaire : « Hitler est pressé de nous envahir, mais il a de bonnes raisons ».
Et en effet, Hitler était pressé par le temps, il se rendait compte qu’il serait écrasé s’il n’attaquait pas le premier. Dans le même temps Zoukov ajoutait « Il nous faut encore quelques mois pour corriger nos défauts avant la fin de 1941. Il nous faut 18 mois pour achever la modernisation de nos forces ». La feuille de route était tout à fait claire. Lors de la quatrième session du soviet suprême en 1939, il a été décrété que les officiers de l’armée serviraient trois ans, les soldats quatre et les hommes de la marine cinq. Ces décisions ont été prises moins d’un mois après la signature du traité de non-agression.
Ainsi, tout en s’engageant pour la paix, les Soviétiques préparaient fiévreusement la guerre. 160 divisions étaient sur pied, 60 divisions blindées placées en alerte maximale. Les Allemands ne comptaient que dix divisions blindées. En 1941, les Soviétique avaient 17 000 chars ils en auraient eu 32 000 en 1942. Ils avaient 92 578 pièces d’artillerie et leurs 17 545 avions de combat en 1940 leur donnaient une écrasante supériorité numérique sur la Luftwaffe.
Devant une telle montée en puissance, il est facile de comprendre qu’Hitler n’avait pas le choix : soit il attaquait tout de suite, soit il s’exposait à l’anéantissement.
Barbarossa était la campagne de la dernière chance, Hitler ne partait pas en Russie avec un grand optimisme, il me disait plus tard : « Quand je suis entré en Russie, j’étais comme quelqu’un devant une porte. Je savais que je devais l’enfoncer, mais sans savoir ce qu’il y avait derrière ». Hitler avait raison de se méfier, il savait que les Soviétiques étaient forts, mais il savait surtout qu’ils allaient l’être encore plus. Sa seule fenêtre de tir, c’était en 1941. Les Anglais n’avaient pas encore réussi à étendre la guerre. Hitler, qui n’avait jamais voulu d’une guerre avec l’Angleterre, s’efforçait encore à la paix. Il m’avait invité à passer une semaine chez lui. Il voulait discuter de toute la situation et avoir mon avis. Il a parlé très simplement et très clairement. L’atmosphère était informelle et détendue. Il nous mettait à l’aise, il adorait recevoir. Il beurrait des toasts à la bonne franquette et les faisait passer à la ronde. Bien qu’il ne bût pas lui-même, après chaque repas, il allait chercher une bouteille de champagne parce qu’il savait que j’aimais finir par une petite flûte. Le tout sans chichi et avec une gentillesse non feinte. Ça faisait partie de son génie d’être un homme aux manières simples, sans la moindre affectation et d’une grande humilité.
Nous avons parlé de l’Angleterre, je lui demandais sans détours : « Mais pourquoi diable n’avez-vous pas achevé les Anglais à Dunkerque ? Tout le monde savait que vous auriez pu les écraser ». Il répondit : « Oui en effet, j’ai retenu mes troupes et laissé s’échapper les Anglais. L’humiliation d’une telle défaite aurait ensuite rendu difficile des discussions de paix ».
Hitler m’expliquait de même qu’il ne voulait surtout pas détromper les Soviétiques qui pensaient qu’il avait l’intention d’envahir l’Angleterre. Par exemple, il faisait distribuer des petits dictionnaires anglais/allemands à ses troupes en Pologne. Les espions soviétiques n’ont pas manqué de rapporter ce fait au Kremlin en expliquant que la présence allemande en Pologne était du bluff et que les soldats étaient prêts à être envoyés en Angleterre.
Le 22 juin 1941, c’est la Russie qui était envahie par l’Allemagne, pas l’Angleterre. Les victoires initiales ont été rapides mais coûteuses. J’ai vécu la lutte épique du front russe. C’était tragique et épique, un martyre. L’immensité sans fin des steppes russes était accablante. Nous devions rejoindre le Caucase à pied, toujours dans des conditions extrêmes. En été nous avions parfois de la boue jusqu’aux genoux, en hiver nous gelions sous des températures négatives. Mais il ne s’en est fallu que de quelques jours pour qu’Hitler ne remporte la guerre en 1941. Avant la bataille de Moscou, il avait réussi à mettre l’armée soviétique en déroute et à faire des prisonniers en quantités énormes.
Le groupe de panzers de Guderian, qui avait encerclé près d’un million de soldats autour de Kiev, était parvenu jusqu’aux têtes de lignes du tramway de Moscou. Et c’est alors qu’un incroyable coup de froid s’est abattu : 40, 42, 50 degrés sous zéro ! Les hommes gelaient, le matériel était pris dans la glace. Plus aucun char n’avançait. La boue de la veille s’était muée en un bloc de glace compact d’un demi-mètre de haut, et les chenilles étaient prises.
En 24 heures, tous nos choix tactiques étaient remis en question. Des masses de troupes sibériennes en provenance de l’Extrême-Orient russe se ruaient à l’assaut des Allemands. Ces quelques jours fatidiques de gel qui ont fait la différence entre la victoire et la défaite, étaient dû au retard provoqué par la campagne des Italiens en Grèce à l’automne 1940.
Mussolini entretenait une jalousie sourde envers les succès d’Hitler. J’étais un ami de Mussolini, je le connaissais bien. C’était un homme remarquable qui se souciait peu de l’Europe. Il ne voulait pas rester les bras croisés à regarder Hitler gagner partout. Il lui fallait impérativement faire quelque chose par lui-même, vite. Sur un coup de tête, il a lancé une offensive insensée contre la Grèce.
Ses troupes ont été immédiatement stoppées, mais cela a donné un prétexte aux Anglais pour envahir la Grèce qui jusque-là se tenait en dehors du conflit. À partir de la Grèce, les Anglais auraient pu bombarder les champs de pétrole en Roumanie, si vitaux pour l’effort de guerre de l’Allemagne. La Grèce aurait aussi pu servir à couper la route de la Russie aux troupes allemandes. Hitler était obligé d’assurer ses arrières préalablement. Il a dû perdre cinq semaines dans les Balkans. Ses victoires ont été une réussite logistique incroyable [avec des exploits des Waffen SS de Dietrich parvenant à faire sauter des verrous qui avaient bloqué les Italiens], mais elles ont retardé d’autant le début de la campagne en Russie, un retard qui s’avèrera fatal.
Si Hitler avait pu démarrer sa campagne à temps, comme prévu, il serait entré à Moscou cinq semaines plus tôt, durant l’automne, alors que le sol était encore sec. La guerre aurait été terminée et l’Union Soviétique aurait appartenu au passé. La combinaison d’un gel soudain et l’arrivée de troupes fraîches en provenance de Sibérie avaient semé la panique parmi les vieux généraux de l’armée. Ils voulaient se replier à trois cents kilomètres de Moscou. Difficile d’imaginer un plan plus stupide ! Le gel affectait aussi les Russes de l’Ouest à l’Est et retraiter de trois cents kilomètres n’aurait fait qu’aggraver les choses. À l’époque, j’étais à la tête de mes troupes en Ukraine et il faisait moins 42°c
Une telle retraite aurait signifié qu’on abandonnait toute l’artillerie lourde, les canons automoteurs et les tanks pris dans la glace. Cela aurait aussi signifié qu’on exposait un demi-million d’hommes au harcèlement à outrance de la part des Soviétiques, c’était les condamner à une mort certaine. Il n’était que de se souvenir de la retraite de Napoléon en octobre 1812. Il a traversé la Bérézina en novembre, et mi-décembre, toutes les troupes françaises avaient quitté la Russie. Il faisait froid, mais ce n’était pas une campagne d’hiver.
Est-ce qu’on se figure ce qu’aurait pu donner en 1941 un demi-million d’Allemands affrontant le blizzard, coupé de leurs approvisionnements, attaqué de tous côtés par des milliers de cosaques ? Une charge de cosaques, je sais ce que c’est pour en avoir subi, seule une puissance de feu des plus conséquentes peut les arrêter. Pour conjurer une telle retraite, Hitler a dû renvoyer pas moins d’une trentaine de généraux en quelques jours [dont Guderian].
C’est alors qu’on a fait appel aux Waffen SS pour combler les brèches et remonter le moral. Immédiatement les SS ont pris les choses en main devant Moscou. De toute la guerre, les Waffen SS n’ont jamais rien cédé, ils préféraient mourir plutôt qu’abandonner une position. Les chiffres sont terribles. Durant l’hiver 1941, les Waffens SS ont perdu 43 000 hommes sur le front de Moscou. Le régiment Der Führer a pratiquement littéralement combattu jusqu’au dernier homme, à la fin, ils n’étaient plus que 35. Les hommes du Der Führer ont tenu bon et aucun soldat soviétique n’a réussi à passer. Ils ont essayé de contourner les SS dans la neige, c’est comme ça que le fameux général Vlassov s’est fait prendre par les SS de la division Totenkopf . Sans leur bravoure, l’Allemagne aurait été défaite dès décembre 1941.
Hitler ne l’oubliera jamais : il avait pris la pleine mesure de la farouche volonté dont avaient fait preuve les Waffen SS devant Moscou. Ils avaient montré qu’ils avaient du sang-froid et des tripes et c’est ce qu’Hitler admirait le plus. Il ne se contentait pas d’avoir des collaborateurs intelligents. De telles personnes peuvent s’effondrer du tout au tout, on l’a bien vu avec le général Paulus l’hiver suivant à Stalingrad. Hitler savait que seuls l’énergie des tripes, le refus de se rendre et la volonté obstinée de tenir coûte que coûte feraient la différence.
Le blizzard des steppes russes avait montré que même la meilleure armée du monde, l’armée allemande, avec ses milliers d’officiers hautement qualifiés et ses millions d’hommes disciplinés pouvait être battue. Il fallait quelque chose d’autre, une foi inébranlable en un idéal supérieur pouvait seule permettre de renverser les situations les plus compromises. Les Waffen SS avaient cet idéal, et à partir de là, Hitler s’est appuyé sur eux sans réserve.
De toute l’Europe, les volontaires affluaient pour aider les frères allemands. C’est alors qu’a surgi la troisième vague de Waffen SS. Il y avait d’abord eu les Allemands, puis les ethnies germaniques et finalement les Waffen SS européens. Pour défendre la civilisation et la culture occidentale, des centaines de milliers jeunes se sont portés volontaires. Ils s’engageaient en sachant pertinemment que les SS avaient le plus fort taux de mortalité. Plus de 350 000 sur 1 million allaient mourir au combat. Mais pour eux, malgré les morts de tant d’individus, c’était la naissance d’une nouvelle Europe.
Ces jeunes volontaires étaient sûrs de deux choses: premièrement qu’Hitler était le seul à pouvoir bâtir l’Europe et, deuxièmement, que lui seul pouvait vaincre la menace que faisait peser le communisme sur le monde.
Pour ces hommes de la SS, l’Europe des petites rancœurs, du chauvinisme étroit, des différends frontaliers et des rivalités économiques était sans intérêt. C’était petit et mesquin, une telle Europe était discréditée à leurs yeux. Pour autant, aussi grande soit leur admiration pour Hitler et les Allemands, ces SS d’Europe ne voulaient pas devenir Allemands. Ils restaient des hommes de leurs peuples, l’Europe c’était une réunion de peuples du continent, l’unité serait atteinte dans l’harmonie, pas par la domination des uns sur les autres.
J’ai longuement discuté de ces sujets avec Hitler et Himmler. Comme tous les hommes de génie, Hitler avait dépassé le cadre national. Napoléon avait d’abord été Corse, puis Français, puis Européen et enfin un homme universel. De même Hitler avait d’abord été Autrichien, puis Allemand, puis membre de la grande Allemagne, puis de la sphère germanique et enfin il a acquis la dimension d’un homme d’État européen.
Les Waffen SS s’étaient solennellement juré, après la défaite du communisme, de consacrer tous leurs efforts à la construction d’une Europe unifiée.
Avant d’être intégrée aux Waffen SS, notre unité Wallonne avait connu bien des vicissitudes. Nous avons d’abord été envoyés sur le front de l’Est en tant qu’unité auxiliaire de l’armée allemande, mais après la bataille de Stalingrad, on voyait que l’Europe était dans une situation critique. Il fallait faire front commun. Une nuit, j’ai eu un débat avec Hitler et Himmler, pendant huit heures nous avons parlé du statut des non Allemands dans le cadre d’une nouvelle Europe.
Nous voulions à présent être traités en égaux combattant pour une cause commune. Hitler a parfaitement compris, et à partir de là, nous [la légion Wallonie] avons eu notre propre drapeau, nos propres officiers, notre propre langue et notre propre religion. Nous étions sur un pied d’égalité.
J’ai été le premier à avoir des aumôniers catholiques dans les Waffen SS. Par la suite, il y a eu des aumôniers de toutes confessions pour ceux qui le demandaient, les Français avaient même un évêque. Nous étions confiants dans le fait qu’avec Hitler, l’Europe serait une fédération d’égaux. Notre sentiment en ces heures critiques, était que la meilleure façon de gagner notre place en tant qu’égaux était de défendre l’Europe aussi bien que nos camarades Allemands.
Pour Hitler, ce qui comptait le plus, c’était le courage, il a créé une nouvelle chevalerie. Ceux qui obtenaient la croix de chevalier, la Ritterkreuz, étaient les nouveaux chevaliers. Ils intégraient la noblesse du courage. Et après la guerre, chacune de nos unités de retour dans son pays, serait la force qui protègerait les droits de son peuple dans chacun de nos pays respectifs. Tous les SS entendaient l’Europe comme comprenant l’ensemble de l’Europe, y compris la Russie.
Chez beaucoup d’Allemands il y avait une grande méconnaissance des Russes. Ils pensaient que tous les Russes étaient communistes, alors que la place des Russes dans la hiérarchie communiste n’était pas significative. Ils pensaient aussi que les Russes étaient très différents des Européens ils ne voyaient pas qu’ils avaient en fait des structures familiales similaires, une ancienne civilisation, une foi enracinée, et des traditions qui ne sont pas sans rappeler celles des autres pays en Europe.
Les SS voyaient l’Europe composée de trois grandes parties : l’Europe centrale comme moteur de l’Europe, l’Europe de l’Ouest comme son cœur culturel, et l’Europe de l’Est comme son potentiel. Ainsi, l’Europe envisagée par les SS était vivante et réelle. Ses six cents millions d’habitants vivraient de la mer du Nord à Vladivostok. C’est dans cette étendue de 10 000 kilomètres que l’Europe pouvait atteindre sa destinée. Elle aurait été un espace pour les jeunes pour démarrer une nouvelle vie. Elle aurait été le phare du monde, un ensemble racial remarquable, une civilisation millénaire, une force spirituelle, et le foyer scientifique et technologique le plus avancé. Les SS se battaient pour cette haute destinée de l’Europe.
Comparez ces buts, ces idéaux, à ceux des « Alliés ». Les Roosevelt et les Churchill ont vendu l’Europe à Téhéran, Yalta et Potsdam. Ils ont tout bonnement capitulé devant les Soviétiques. Ils ont livré la moitié du continent à l’esclavage communiste. Ils ont laissé le reste de l’Europe se désintégrer moralement sans idéal pour l’animer. Les SS savaient ce qu’ils voulaient : une Europe avec un idéal commun et le salut de tous.
Cette foi a animé quatre cents mille SS allemands, trois cents mille SS Volksdeutsche et trois cents mille autres SS d’Europe. Un million de bâtisseurs de l’Europe, tous volontaires.
Les rangs de la SS se sont gonflés à mesure que le front de l’Est se rapprochait de l’Allemagne. Plus la situation devenait critique, plus il affluait de volontaires. C’était phénoménal, encore huit jours avant la défaite finale, j’ai vu des centaines de jeunes rejoindre les SS au front. Jusqu’à la fin ils voulaient tenter l’impossible pour arrêter l’ennemi.
Des 180 hommes de la Leibstandarte en 1933 aux trois régiments SS d’avant 1939, puis des trois régiments en Pologne, aux trois divisions en France, puis des six divisions au début de la guerre avec la Russie aux 38 divisions en 1944, les Waffen SS comptaient 50 divisions en 1945. Plus il tombait de SS plus il en arrivait pour les remplacer. Ils avaient le feu sacré et ils ont tenu bon jusqu’à l’extrême limite. C’est exactement le contraire de ce qui s’est produit en janvier 1943 à Stalingrad. La défaite a été décidé par un homme sans courage, incapable d’affronter le danger avec détermination, d’affirmer sans équivoque: je ne me rendrai pas, je tiendrai jusqu’à la victoire. Il était moralement et physiquement dépourvu de tripes, et il a perdu.
Une année plus tard, les divisions SS Vinking et Wallonia étaient encerclées de la même manière à Tcherkassy. Avec le désastre de Stalingrad encore frais dans les esprits, les soldats auraient pu facilement céder au découragement. En plus, j’étais handicapé par une blessure au côté et par une forte fièvre. Chef des forces Wallonnes, je savais que tout cela n’était pas bon pour le moral. Je me suis levé, et pendant 17 jours, j’ai mené charge sur charge pour briser l’encerclement, j’ai été pris dans de nombreux corps-à-corps, j’ai été blessé à quatre reprises, mais je n’ai jamais cessé le combat. Tous mes hommes ont fait la même chose et plus. Nous nous en sommes sortis avec nos tripes et notre volonté de SS.
Après Stalingrad, quand beaucoup pensaient que tout était perdu, que les forces soviétiques se répandaient en Ukraine, les Waffen SS les ont stoppées net dans leur élan. Ils ont repris Kharkov et infligé de sévères défaites aux Soviétiques. C’était typique, combien de fois les SS ont changé les revers en victoires.
La même énergie sans failles se retrouvait en Normandie, Patton parlait des « fières divisions SS ». Les SS étaient l’épine dorsale de la résistance en Normandie, Eisenhower remarquait : « comme d’habitude, les SS se sont battu jusqu’au dernier ».
Si les SS n’avaient pas existé, l’Europe aurait été entièrement conquise par les Soviétiques en 1944, ils auraient atteint Paris bien avant les Américains. Leur héroïsme a stoppé les coups de boutoir de l’ennemi à Moscou, Kharkov, Tcherkassy et Ternopol, faisant perdre aux Soviétiques plus de 12 mois. Sans la résistance SS, ils auraient été en Normandie avant Eisenhower. Les peuples ont témoigné d’une profonde gratitude envers ces jeunes qui ont sacrifié leur vie. On n’avait plus vu un tel idéalisme et un tel héroïsme désintéressé depuis les ordres religieux du Moyen Âge. Dans ce siècle matérialiste, les SS se dressent comme un phare dans la nuit.
Je suis sûr que les sacrifices et les hauts faits d’armes des Waffen SS trouveront un jour un poète pour célébrer leur épopée, ils auront leur Schiller. La grandeur dans l’adversité, c’est la marque des SS.
Après la guerre, un voile de silence a couvert les Waffen SS. Mais à présent, de plus en plus de jeunes connaissent leur existence et leurs exploits. La renommée va grandissante et les jeunes veulent en savoir plus. Dans un siècle, à peu près tout aura été oublié sauf la grandeur et l’héroïsme des Waffen SS. C’est la récompense d’une épopée.
Léon Degrelle
Traduction et adaptation : Francis Goumain
From The Journal of Historical Review, Winter 1982-83 (Vol. 3, No. 4). This essay by Leon Degrelle (1906-1994) was first presented at the Fourth IHR Conference in Chicago (Sept. 1982). In October 2015 the introduction text was revised, and the main text was edited for clarity and to eliminate typos and errors.
Il y a dans ces lignes tous les ingrédients pour construire un nouveau monde. Ce nouveau monde n’aura rien inventé, non, il aura fait beaucoup mieux, celui de faire des choix dans ce qui est et de structurer le reste à sa nouvelle destinée.
La Nouvelle Vie Européenne, tel sera son nom.
Gérard de Blotzheim