Chronique de l’échec du « vivre-ensemble » au 6 janvier 2017
Amine.M, Walid.E: trafic de drogue, procès sous haute tension
Trafic de drogue à l’Echarde : quatre jours de procès sous tension à Compiègne
Dans les couloirs du palais, on parle de plusieurs — au moins deux — millions d’euros de bénéfice. Depuis mardi, et jusqu’à vendredi, le tribunal correctionnel va se pencher sur un trafic de stupéfiants qui s’est tenu à l’Echarde, dans le quartier Bellicart, entre « courant 2012 » et juin 2014. Une enquête menée par l’antenne de la police judiciaire de Creil. Vingt personnes doivent comparaître.
Les faits concernent essentiellement de la résine et de l’herbe de cannabis avec, à la marge, de l’héroïne et de la cocaïne. Des armes ont également été saisies au cours des investigations. Si la majeure partie des prévenus est accusée d’avoir trafiqué, certains d’entre eux sont suspectés d’avoir importé la drogue depuis l’étranger. On dépasserait donc le simple trafic local, d’où l’association de malfaiteurs retenue pour une partie des prévenus, qui encourent des peines plus importantes.
A la tension qui devrait régner ces prochains jours, qui plus est dans la petite salle d’audience du tribunal où prévenus, avocats et public devront se serrer, s’ajoute un autre élément : le meurtre par balles, le 10 juillet 2016, d’Issa Camara, 29 ans, habitant du quartier de l’Echarde. Si ce dernier n’était pas impliqué dans le trafic, deux de ses proches feront face au juge cette semaine. Placés sous contrôle judiciaire depuis de longs mois, ils avaient obtenu une dérogation, cet été, pour accompagner le corps du défunt au Mali. Eux comparaîtront libres.
A quelques mètres, dans le box réservé aux personnes placées en détention provisoire, se trouveront Amine M. suspecté d’être l’auteur des coups de feu, et Walid E., supposé complice.
Amine M. était justement sous le coup d’un mandat d’arrêt, lors des faits du 10 juillet, pour n’avoir pas respecté son contrôle judiciaire dans l’affaire du trafic de drogue. Pour parer à tout débordement, un dispositif policier devrait être mis en place. Les réquisitions du parquet, représenté par Sarah Gonzalvez, sont attendues jeudi après-midi.
Jonathan Bofunda-Mbata poignarde Loïc de 4 coups de couteau
Jonathan Bofunda-Mbata, 28 ans, s’est « contenté » de la comparution immédiate, lundi, où il a écopé de deux ans ferme, avec mandat de dépôt, pour des violences avec arme.
Le 30 décembre à midi, un dénommé Loïc est retrouvé couvert de sang, lardé de quatre coups de couteau, dans un café de la rue Jules-Barni, à Amiens. D’emblée, les policiers flairent une histoire de stupéfiants puisque la victime se refuse à donner les raisons de la rixe, et même à décrire son agresseur. L’affaire est sérieuse : le jeune homme est touché au thorax, un lobe du poumon lui sera retiré, il souffre également d’une plaie au foie.
Par le frère du blessé, on identifie Jonathan comme l’agresseur. Ses premières déclarations sont confuses mais tout s’éclaire en fin de garde à vue : « Je suis vendeur de drogue. J’employais un petit. En juin, j’ai dû m’absenter un week-end et j’ai demandé à Isaac de superviser le petit mais il m’a volé un sac de stupéfiants, pour une valeur de 500 euros », explique le réfugié politique congolais, en France depuis dix ans.
Jeudi dernier, le 29 décembre, Jonathan est retombé sur Isaac, à qui il a réclamé ses 500 euros, et volé un téléphone portable – Jonathan parle lui d’une « remise en mains propres ». Il s’avère que ce téléphone serait la propriété de Loïc, lequel a aussitôt frappé à la porte de Jonathan et de son frère pour récupérer son bien.
Le litige a culminé le 30 décembre, vers midi, rue Pinceau, près de la gare. « J’avais pris un couteau dans la cuisine de ma mère parce que j’avais peur que ça dégénère, explique Jonathan. On a parlé avec Loïc et Isaac (qui a pris la fuite et que les enquêteurs n’ont pu retrouver) mais dès que mon frère est rentré chez lui, Loïc m’a donné un coup de poing. Il est boxeur, j’ai pris peur et j’ai sorti mon couteau pour l’écarter mais je n’avais pas l’impression de le toucher ». Devant l’enquêteur de personnalité, il ajoutera : « C’est un dommage collatéral. Je n’ai rien à voir avec cette vie, je suis un garçon gentil ». Là, le président Manhes tique un peu : « Des coups de couteau, une extorsion, des stupéfiants et des faux papiers. Ça fait beaucoup, pour un garçon gentil… »
Car lors de la perquisition chez Jonathan, les policiers ont trouvé des faux papiers (une carte d’identité et un permis de conduire) avec la photo de Jonathan mais au nom de Pino Lattuca, qui fut l’inoubliable pianiste de l’école des fans, version Jacques Martin. « Ce sont des gars à Paris qui me les avaient donnés pour qu’on se fasse un peu d’argent mais ils ne m’ont jamais recontacté », glisse le prévenu. Le président n’insiste pas : certains mystères ont vocation à rester insondables…
Mehdi K., Youssef A. et Abdelkader A. jugés pour l’exécution d’Aïssa
Le 12 mars 2013, un jeune homme avait été abattu de cinq balles dans le dos.
Risque de prison à perpétuité pour le tireur et deux autres accusés impliqués dans ce règlement de comptes aussi idiot que tragique. Mehdi K., Youssef A. et Abdelkader A., respectivement âgés de 35, 33 et 31 ans, sont jugés par la cour d’assises, à partir de mardi et jusqu’au 9 janvier, pour le meurtre prémédité d’Aïssa, abattu de cinq balles dans la cité des Damades, à Nanterre, le 12 mars 2013.
Youssef aurait voulu se venger après une première rixe l’ayant opposé à la victime trois jours plus tôt. Une bagarre violente censée régler une embrouille, qui prendrait source dans un échange de regards. Le 9 mars, Youssef et Aïssa se font face, et c’est Aïssa qui a le dessus. Youssef finit à l’hôpital, le visage tuméfié. Les frères respectifs des deux adversaires tentent d’intervenir pour les dissuader d’aller plus loin. Mais Youssef entend laver son honneur.
Son désir de vengeance est tel qu’Aïssa se sait menacé et « craint pour sa vie », selon le témoignage de sa compagne. Trois jours plus tard, dans l’après-midi du 12 mars, Aïssa et son frère marchent côte à côte dans la cité, où ils habitent. Youssef débarque avec Mehdi, à pied, et entraîne les frères vers l’allée Camélinat pour une explication. Youssef est armé, mais le frère d’Aïssa ne s’inquiète pas outre mesure car ils sont « amis d’enfance », dira-t-il durant l’enquête.
Sauf qu’une fois dans l’allée, à l’abri des regards, Aïssa reçoit cinq balles tirées dans le dos. Au terme de l’instruction et après les aveux de l’intéressé, c’est Mehdi et non Youssef qui aurait tiré. Mais tous deux sont renvoyés devant les assises pour assassinat, le premier pour avoir abattu la victime, le second parce qu’il est « l’instigateur » du meurtre prémédité et qu’il avait « le mobile des faits », selon l’analyse du juge d’instruction. Abedlkader, le frère de Youssef, sera jugé pour complicité : il a couvert la fuite des agresseurs.
Augmentation de 93 % du nombre de saisies de dossiers relevant du terrorisme
Pour endiguer l’augmentation des dossiers terroristes, le tribunal de grande instance de Paris favorise depuis ce lundi un « circuit court, sans juge d’instruction » et le recours aux comparutions immédiates pour les affaires « simples »…
La décision a du mal à passer. Dès ce lundi 2 janvier, les « infractions terroristes à intensité basse » – comprendre les faits d’apologie du terrorisme ou la consultation de sites djihadistes – pourront être jugées en comparution immédiate comme annoncé en novembre dernier, par le président du tribunal de grande instance de Paris, Jean-Michel Hayat. Objectif : désengorger les bureaux du pôle antiterroriste de la capitale, permettre aux juges d’instruction de se concentrer sur les « affaires importantes » et raccourcir les délais pour juger ces « petits délits ». Or plusieurs avocats, notamment l’association des avocats pénalistes, dénoncent une décision qui « méprise la qualité de la décision judiciaire » et une solution « dangereuse ».
« Depuis le début de l’année 2016, il y a eu une augmentation de 93 % du nombre de saisies de dossiers relevant du terrorisme, il fallait apporter une forme de respiration aux juges d’instruction. Ce circuit court donne désormais la possibilité au procureur qui a mené une enquête avec des services de police spécialisés (SDAT, PJ ou DGSI), de ne pas saisir un juge d’instruction mais de saisir directement la juridiction de jugement, à savoir ici la 16e chambre », tient à préciser la présidence du TGI de Paris.
« Aujourd’hui, dans la grande majorité des cas, il y a des investigations liées à leur personnalité, des enquêtes, des expertises psychiatriques qui vont permettre aux juges de mieux cerner l’individu qu’ils ont en face d’eux. Avec les comparutions immédiates, c’est terminé puisqu’il s’agit d’une procédure d’abattage qui effleure les faits. Vous avez 15 minutes, 12 dossiers, les avocats plaident à la chaîne. […] On va avoir un effet boomerang dans quelques années qui va être terrible, on ne peut pas faire l’économie des personnalités en matière terroriste, c’est dangereux. »
Mustapha Abbad, trafic de drogue, incidents pendant le procès
Trafic de drogue à Charleville : procès reporté et rixe devant le palais de justice
Le procès du trafic de drogue de la Ronde Couture a été reporté une nouvelle fois ce mardi matin. Et l’audience s’est achevée dans le sang pour l’un des prévenus.
Une rixe a éclaté vers 13 heures en face du palais de justice entre plusieurs personnes liées au dossier. Blessé au visage, Mustapha Abbad, 29 ans a été évacué par les pompiers vers le centre hospitalier de Manchester.
Reporté une première fois le 7 novembre dernier, le procès de ce trafic de drogue a été émaillé de plusieurs incidents, malgré une présence policière dans l’enceinte du tribunal. La raison de ce nouveau report : huit des prévenus qui devaient être jugés ce matin sont liés directement ou indirectement à un autre dossier. Une affaire criminelle, la mort de Jaouel Rondeau tué par arme automatique à la Ronde Couture, le 23 juin 2014. Pour faire simple, l’instruction de ce dossier criminel n’étant pas terminée, plusieurs avocats ont demandé le renvoi du procès de ce trafic de stupéfiants pour préserver « les droits de la défense de leurs clients ». Un nouveau procès se tiendra donc le 27 février prochain.
En revanche, deux des 10 prévenus devant finalement être jugés cet après-midi, le procès s’est tenu à huis clos à la demande de leurs conseils. Le procureur et le tribunal n’ont fait aucune objection pour accéder à cette demande.
Brahim, 13 fois condamné, fonce sur la police
Incarcéré depuis 18 mois dans l’attente de son procès, Brahim, 32 ans, est mis en examen pour tentative de meurtre sur des gendarmes et conduite sans permis ni assurance. Il vient de faire appel, en vain, d’une ordonnance prolongeant sa détention provisoire. A peine amené dans le box par l’escorte, le jeune homme décide de rester assis.« Je suis fatigué », répond-il à la présidente qui lui demande de se lever.
Le 1er juillet 2015, il a percuté l’arrière d’un véhicule de la gendarmerie sur l’A 10, près de Mer. Un gendarme s’était blessé en sautant dans un fossé (65 jours d’incapacité totale de travail), sa collègue, assise au volant, avait été touchée aux cervicales (cinq jours d’ITT). Pour les militaires, il s’agissait d’un acte délibéré, le conducteur ayant donné un coup de volant brutal dans leur direction. Ce que nie Brahim qui invoque l’accident. Ce « jeune » condamné à 13 reprises, était sorti de prison le 16 juin précédent et roulait malgré un permis annulé. Selon ses explications, il avait décidé de faire un tour pour décompresser après avoir perdu une forte somme au PMU. Il affirme avoir eu un malaise lié à une hypoglycémie suite à l’absorption d’une boisson énergisante. L’expert auto n’a décelé aucune défaillance technique sur sa Twingo, il a relevé simplement un dépôt de gomme au sol dû au changement de direction mais aucune trace de freinage. L’expert médical, lui, a écarté l’hypothèse d’un malaise par hypoglycémie, la boisson absorbée ne comportant ni excitant, ni stimulant.
La cour a prolongé sa détention provisoire.
Youssef, récidiviste, un an de prison pour une exhibition sexuelle
«Je n’ai agressé personne. Je ne les ai pas suivies », maintient Youssef Flaiou, 35 ans. Selon lui, il est victime de la rumeur.
Cet habitant de Cavaillon a comparu en correctionnelle, à Avignon, pour des faits d’exhibition sexuelle commis le soir de Noël.
Considéré comme récidiviste, pour avoir été condamné en 2013, Youssef Flaiou est également mis en cause dans une affaire similaire qui sera examinée à l’audience du 10 janvier prochain. Il devra s’expliquer sur ce qui a pu se passer le 8 octobre à Cavaillon. La victime assure que le prévenu est entré par la fenêtre de son salon pour se masturber devant elle. Lui conteste.
Avant d’en arriver là, le tribunal, présidé par Michèle Nesme, l’a maintenu en détention et condamné à un an de prison dont trois mois sont assortis du sursis et d’une mise à l’épreuve de deux années pour les faits constatés.
Deux jeunes femmes qui ont rendez-vous dans une rue du centre-ville ont la mauvaise surprise de voir un homme sortir son sexe et commencer à se masturber en les regardant.
Les deux amies marchent dans la direction opposée et préviennent la police. Une patrouille arrive au bout de quelques minutes. Youssef Flaiou est repéré dans un coin. Dos au mur et la main dans le pantalon.
« Les circonstances sont inquiétantes », observe la vice-procureur Isabelle Tourn. Et l’expert qui a rencontré le prévenu de résumer dans son rapport : « il souffre de troubles de la personnalité et d’un état alcoolique dangereux ».
Pendant son passage en garde à vue, Youssef Flaiou a refusé de s’expliquer face aux enquêteurs. « J’avais envie de répondre mais j’étais un peu gêné », concède le prévenu. Et de détailler que, ce jour-là, il avait consommé beaucoup d’alcool et des cachets de Subutex. Un substituant à l’héroïne habituellement prescrit par un médecin mais qu’il a pu acheter au marché noir. Selon lui, ce cocktail lui provoquerait des gênes pour uriner…