Considéré par la police judiciaire comme un caïd majeur de la région de Grenoble, Mehdi Boulenouane, 30 ans, a été libéré de la prison de Moulins-Yzeure, mardi 7 juin, au terme d’un bras de fer peu banal entre ses avocats et le parquet de Lyon. Après un an de détention provisoire, dans un dossier de trafic de stupéfiants et blanchiment en bande organisée, le prévenu, avait obtenu dans un premier temps sa mise en liberté, à quelques mois de son procès, qui doit avoir lieu en septembre au tribunal correctionnel de Lyon. Dans sa décision, rendue le 27 mai 2015, la 16e chambre présidée par Jean-Hugues Gay, avait assorti le contrôle judiciaire d’une caution de 500 000 euros. Dissuasive ? Pas du tout. Neuf jours plus tard, la somme était déposée au tribunal de grande instance de Lyon. Mais en espèces et selon des modalités étonnantes. Au total, 29 personnes se sont succédé à la régie, apportant des coupures de 500 euros, par liasses de 7 000 à 70 000 euros. Un procédé qui a fait bondir le procureur de la République de Lyon qui a ouvert une enquête de flagrance pour blanchiment. Il a saisi la caution, et le tribunal d’une « requête en difficulté d’exécution ». Dans laquelle il a argumenté : « Les billets étaient humides et sentaient une forte odeur d’alcool et de colle. » Pour le procureur, ces éléments laissent supposer « un traitement spécifique afin de dissiper toute trace suspecte, montrant ainsi à travers ce mode opératoire particulier une concertation préalable à ce versement ».
Des billets à l’origine douteuse ? Pas question pour le parquet de laisser se consommer un délit dans les couloirs mêmes du palais de justice. Mardi 7 juin, le tribunal a examiné l’affaire en chambre du conseil, avec le détenu en visioconférence. La décision est tombée en fin d’après-midi.
En substance : l’exécution d’une mesure de libération déjà jugée n’est plus de la compétence du tribunal. La balle est revenue dans le camp du procureur, qui a immédiatement fait appel.
En attendant, il a dû se résoudre à ordonner au centre pénitentiaire la libération du prévenu, sous peine de détention arbitraire.