La République est pourrie. Elle est le régime de la corruption, de la médiocrité, de la crasse, des tarés et des étrangers. La république est le règne du vide, du néant, cet éther où ne peuvent évoluer avec bonheur que les pires asticots de l’humanité, les Narcisses aux idées tordues et ne considérant tous ceux qui les entourent que comme des choses à exploiter, à aspirer, à vampiriser ou comme des jouets. La république est pourrie et les héros qu’elle décrète et qu’elle glorifie sans cesse pour faire tenir les statues et les statuts en témoignent aisément. La république sécrète des personnalités détraquées, épouvantablement orgueilleuses et médiocres, épouvantablement ambitieuses et cruelles, impitoyables et insatiables dans leur quête d’égoïsme infinie. Elle voudrait s’amender que la république ne le pourrait pas : ses monstres sont ses tréteaux. Les remettre en cause fait vaciller son édifice. Une simple remise en question de certaines de ses icônes est symboliquement dévastatrice. Mais parfois, pas seulement symboliquement dévastateur.
LA RÉPUBLIQUE EST LEUR MÈRE !
Elle l’est bien sûr moralement, politiquement, économiquement et elle est dangereuse socialement pour les disciples, héritiers, camarades, petits copains, associés, des personnalités récemment trépassées. Feu Pierre Bergé est de celles-là. Comme nous allons le voir, il n’y a rien de plus républicain que cet animal-là, rien de plus funeste, rien de plus nocif, humainement, moralement, politiquement, socialement. Cet homme était un véritable fléau et il l’est encore par le jeu des alliances, des héritages, des compromissions. Il est un passé (récent) qui ne passe pas pour parler à la manière d’un bobo. Il ne passe pas car l’entreprise Bergé est maligne, active, fertile. Le sodomite avait pris soin de se “marier” avant sa mort avec l’un de ses amants principaux, le jardinier qui se prend pour Le Nôtre, Madison Cox, gérant d’une fortune qu’il fait fructifier aussi bien en Europe (en particulier à Paris) qu’au Maroc où Bergé, on l’aura compris, avait ses petites habitudes. Et ça monte des musées et ça rénove la villa Majorelle et ça emploie certaines personnes, et ça fait pression sur les politiques et ça poursuit les activités de Bergé…
Néanmoins, force est de constater que le veuf Madison Cox n’a pas les moyens de faire taire les nombreux témoins et critiques qui attaquent l’univers cauchemardesque fabriqué par Pierre Bergé et que, lui, défendait avec une brutalité procédurière extraordinaire. La preuve indéniable avec ce livre étonnant (étonnant parce qu’il a paru) de l’ancien chauffeur de Pierre Bergé puis du très torturé Yves Saint-Laurent, Saint Laurent et moi, une histoire intime. Cet ouvrage de Fabrice Thomas (l’ancien chauffeur) est une bombe médiatique, d’ailleurs diffusée au Québec dans un premier temps, les éditeurs français n’en voulant pas, panique oblige. Sans surprise, les media français maintiennent un black-out parfait, un silence total autour du témoignage de cet enfant de la balle dont l’expérience et les connaissances ne peuvent en aucun cas être remises en cause.
Fabrice Thomas est en effet né dans une famille initialement ravagée par notre triste sire. Sa mère faisait des ménages dans une drôle d’ambiance chez Bergé et son père fut lui-même chauffeur de l’énergumène. Un père qui, selon son propre fils, servait déjà en son temps d’objet sexuel au magnat de la couture et des œillets. Bien que Fabrice Thomas se considère comme normalement hétérosexuel, il affirme dans son livre et face à plusieurs journalistes québécois (apparemment non soumis aux pressions “hexagonales”) que son emploi de chauffeur eut un coût exorbitant puisqu’il exigeait une soumission homosexuelle de chaque instant. Dans ce monde de mort, l’argent achète tout et même la nature des hommes pourtant bien nés.
TÉMOIGNAGE D’UN GITON ?
Bergé était content en voyant arriver le fiston qui savait ce qui l’attendait en présentant sa candidature. En signant le contrat, Fabrice Thomas signait un pacte avec le diable : pendant de nombreuses années, le chauffeur multicartes fut en quelque sorte une espèce de réceptacle sexuel pour Pierre Bergé, cet humaniste si distingué qui, si l’on en croit les assertions de l’auteur, troussait ses domestiques mâles à tout moment de la journée et de la nuit sans prévention aucune. Ce livre, nous le voyons, décrit des pratiques abominables et une atmosphère de backroom parisienne. Mais il est modéré, nous dit Fabrice Thomas ; il est édulcoré, prévient-il. Son dessein n’est pas de choquer son lectorat mais d’avertir, d’éclairer en espérant que d’autres prennent le relais pour dévoiler l’inimaginable plus largement. Doit-on s’attendre au pire, à la révélation du pire ? Déjà, Fabrice Thomas affirme que Pierre Bergé et son amant, tout aussi azimuté, Yves Saint-Laurent étaient de « grands malades ».
Non seulement parce qu’ils étaient tous les deux des extrémistes du sado- masochisme (par simple décence nous ne donnerons aucun détail mais les scènes décrites sont horribles et dépassent l’imagination) mais aussi parce qu’ils avaient certains penchants… Sur une télévision canadienne, Fabrice Thomas déclara tout récemment : « D’autres révélations vont être faites dans le futur. Car ce qui est sûr, quand on parle de Dominique Strauss- Kahn ou de Weinstein, croyez-moi, ce sont des enfants de chœur à côté de lui (Pierre Bergé). »
LES PAUVRES ENFANTS
Fait-il référence à un passage de son texte dans lequel est évoquée l’horreur pédomane observée dans les jardins de la villa Majorelle au Maroc ? On sait, du reste, qu’en 2013 le magazine VSD s’était intéressé de près aux activités qui se perpétuaient en ce lieu, et où était invité très souvent un ancien ministre très branché de la Mitterrandie ; un ami de Bergé qui servait de lien entre ce dernier et Mitterrand (dont le frère Robert n’est autre que le père du dégoûtant Frédéric). Une scène horrible est décrite dans le livre avant que Thomas ne fasse part de l’indifférence de Yves Saint-Laurent devant ces faits ; YSL, qui, il est vrai, semblait habitué à vivre l’épouvante.
Alors qu’attendent les grands journaux “français”, pourtant si sensibles, apparemment, aux simples faits de harcèlement, pour réagir, pour relayer, pour vérifier un récit qui ne semble pas du tout fantasmatique, pour mener leur enquête ? Pardon. Ces media sont occupés car la main de Pierre Joxe aurait peut-être effleuré la cuisse d’une femme adulte il y a une dizaine d’années. Le media hexagonal, nous le voyons, a le sens des priorités. Il faut encore ajouter que Pierre Bergé fut l’un des propriétaires du Monde et on n’ose imaginer le nombre de journaleux que cet infect milliardaire libidineux a dû coopter dans le microcosme médiatique. Cette seule pensée est effrayante, horrifique. Quelle nausée quand on pense à tous ces duplices au regard de cocker qui sont en fait de redoutables sadiques !
Dès l’annonce de la disparition de Pierre Bergé à 87 ans, les journaux avaient mis le paquet pour retracer la vie de celui qu’un journal américain avait décrit quelques jours auparavant comme le vrai maître de la république française (Town and Country, septembre 2017) ! Un Bergé dépeint à l’instar du magazine américain, comme l’incarnation de la nouvelle France… Le Figaro le croque comme un génie sensible, affectueux qui aurait voulu devenir académicien pour faire plaisir à sa maman (« elle aurait été tellement fière »). On frémit, car, répétons-le, tout est pourri chez Pierre Bergé. Et l’homme entendait imposer sa pourriture à la France entière, qu’il détestait au plus haut point.
LE COSMOPOLITE
Pierre Bergé était un concentré d’Anti- France. Il quitte le domicile familial à 17 ans pour rejoindre la Lutèce cosmopolite, non le Paris historique. La preuve avec le compagnonnage qu’il fit avec le « citoyen du monde », l’activiste Garry Davis qui prônait la disparition de toutes les nations en vociférant dans la capitale comme un aliéné. À l’âge de 19 ans, ce mégalomane narcissique monte un journal éphémère (deux numéros sortis) qu’il intitule modestement La Patrie mondiale. Déjà, tout un programme…
Voici les citations les plus marquantes de celui qui démarra sa carrière comme le giton du peintre Bernard Buffet avant d’utiliser Yves Saint-Laurent (il le séduit dès qu’il apprend qu’il sera financé par le milliardaire américain Mack Robinson) pour s’enrichir avec gourmandise.
« Fais en sorte que l’idée d’humanité excède en toi celle de toute autre communauté. Fais-toi citoyen du monde autant qu’il est possible. Les États, en d’autres termes, comptent moins que le destin de l’humanité. Lorsqu’ils deviennent des obstacles au progrès de la paix, les États doivent s’effacer devant la loi commune. […] Ou bien la défense invétérée, obscurantiste des “nations”. Ou bien la décision résolue d’assumer des paris raisonnables dont pourrait sortir le progrès de l’humanité. […] Non à ce qui nous enracine, oui à ce qui nous libère de nos racines ; non à ce qui nous rend tributaire d’une concrète, trop concrète communauté, oui à ce qui nous inscrit dans un espace symbolique plus abstrait. L’Europe est un de ces espaces. Si je suis européen, c’est parce que l’Europe nous éloigne de l’obscure magie des racines, des terroirs et des appartenances trop simples. » Pierre Bergé, Liberté, j’écris ton nom (1991)
« Le dimanche a des relents étranges. Ce fut pendant des siècles le “jour du Seigneur”. Il ne fallait pas travailler pour mieux se consacrer à Dieu et mieux prier ? En un mot, la conception même du dimanche est réactionnaire. Aujourd’hui, alors que les églises se vident, il serait sain que les boutiques comme les musées et les cinémas se remplissent. » Pierre Bergé, Globe Hebdo, 11 août 1993.
« J’aimais ce mélange de Beurs, de juifs, d’Arabes, de métis (sic) comme moi. J’aimais ces métèques […]. J’ai toujours su que le meilleur de la France était fait de races diverses, brassées au cours de siècles, et que le métissage lui apportait le sang neuf dont elle avait besoin. J’ai parfois même regretté d’être à ce point franco- français et de n’avoir pu trouver chez mes ancêtres la moindre origine étrangère. » Liberté, j’écris ton nom.
IL ÉTAIT LE VENGEUR MASQUÉ ! ET LA VILAINE LULU ?
Fabrice Thomas le dit et le redit. Il ne pouvait faire éditer son livre en France car le règne de la terreur imposé par Pierre Bergé y est encore prégnant. Finalement le livre est sorti au Québec dans un premier temps, après sa mort ! Il faut dire que l’animal était agressif, méchant, impitoyable. Les vies humaines n’avaient que très peu de valeur pour lui comme en atteste son célèbre tweet de 2013 qui, étrangement, n’interpella pas la justice française.
« Vous me direz, si une bombe explose le 24 mars sur les Champs à cause de la Manif pour tous, c’est pas moi qui vais pleurer. » Ou de joie, aurait-il pleuré, tant les visions d’horreur semblaient le réjouir.
N’est-ce pas sous son magistère que Yves Saint-Laurent créa son immonde bande dessinée La Vilaine Lulu, parue en 1967 (grâce à l’éditeur Claude Tchou, père de l’ancien directeur de cabinet de Marine Le Pen, Philippe Martel, tout se rejoint !) Album dans lequel une petite fille passe son temps à violer, à torturer, à tuer, à décapiter des enfants et des catholiques. Pour le coup, en France, Yves Saint-Laurent n’eut aucun mal à publier cette horreur qu’il affirmait initialement être la description d’une réalité. Plus tard, Saint-Laurent tenta quelque explication pour se protéger en dédramatisant. Il évoqua un collègue de sa prime jeunesse qui s’amusait à se déguiser en petite fille pour faire rire la fine équipe de l’atelier où évoluait le couturier.
Officiellement, selon les dires d’Yves Saint Laurent, Lulu serait née quelque dix ans auparavant, lorsqu’Yves Saint-Laurent travaillait chez Christian Dior :
« Nous étions jeunes, et nous nous amusions beaucoup, raconte le couturier. Souvent, après six heures, un collaborateur de Dior se déguisait. Un soir, il avait remonté ses pantalons jusqu’aux genoux. Je me souviens, il portait de longues chaussettes noires. Dans la cabine des mannequins, il avait trouvé un jupon de tulle rouge et un chapeau de gondolier. Tout petit, presque inquiétant avec son air têtu et rusé, il m’avait impressionné et je lui avais dit : Tu es la vilaine Lulu ».
En 1967, Yves Saint-Laurent était sous l’emprise totale de Pierre Bergé. En 1957 il ne connaissait pas encore son amant sadique qu’il rencontra quelques mois plus tard chez Bernard Buffet. Cette version servait probablement, donc, à protéger son bourreau. Cette bande dessinée démoniaque ressemble en effet à l’univers mental de Pierre Bergé. Fabrice Thomas pourrait, nous le pensons, le confirmer. Voilà en tout cas le genre d’individus qui font la pluie et le beau temps dans leur République immonde.
François-Xavier Rochette
Source : Rivarol n°3305 du 15/11/2017
Achat et abonnement : Boutique Rivarol