États-Unis : la police traque les manifestants à l’aide des données des réseaux sociaux
Une association de défense des libertés civiques aux États-Unis, a publié mardi 11 octobre une série de documents prouvant que la police américaine a exploité les données de réseaux sociaux pour surveiller des manifestations et pister leurs participants. Elle a utilisé pour cela les services de Geofeedia, une entreprise « qui permet à des centaines d’organisations partout dans le monde de prévoir, analyser et agir en s’appuyant sur les signaux des réseaux sociaux en temps réel ».
Geofeedia se connecte aux « applications programming interfaces » des sites de réseaux sociaux, un service que ceux-ci proposent et qui lui permet d’en extraire efficacement des données (contenu des publications, photographies, vidéos, nom d’utilisateur, heure de publication, géolocalisation). Les données sont ensuite analysées et organisées pour les mettre à disposition des forces de l’ordre.
Cette technique est donc maintenant mise en œuvre habituellement aux États-Unis. Elle a par exemple été utilisée pour surveiller la vague de protestations ayant suivi la mort, en août 2014, de Michael Brown, un jeune homme noir tué par un policier. Ou encore dans le cadre des manifestations ayant suivi la mort de Freddie Gray, un autre jeune homme noir abattu par un policier, en avril 2015. Dans ce dernier cas, connectées « en permanence » à Geofeedia, les forces de l’ordre ont pu réagir en temps réel en fonction des données récoltées : « quand un groupe de manifestants a commencé à s’en prendre à des véhicules de police, et à publier des photos de voitures de police en feu sur les réseaux sociaux, les équipes de terrain ont été rapidement alertées. Elles sont arrivées plus nombreuses et en bus, plutôt que chacune de leur côté dans leurs voitures ». Et elle a également été mise en œuvre pour arrêter des manifestants. L’équipe de Geofeedia a par exemple remarqué, à un moment, que « de plus en plus de discussions venant d’un lycée du coin concernaient des jeunes qui avaient prévu de sécher les cours et d’utiliser les transports en commun pour rejoindre la manifestation ». Geofeedia a alors alerté la police « qui a intercepté les jeunes – dont certains avaient déjà détourné un bus – et trouvé leurs sacs à dos remplis de pierres, de bouteilles et de bâtons. »
Geofeedia vante encore le fait que « les officiers de police ont même pu passer les photographies issues des réseaux sociaux dans un système de reconnaissance faciale pour découvrir qui étaient les émeutiers et les arrêter directement dans la foule. » Et les forces de l’ordre confirme qu’il compte se servir de ces technologies après les manifestations en exploitant les archives pour « poursuivre autant de personnes ayant violé la loi pendant ces émeute ».
Dans un courriel échangé en juin avec un procureur, un cadre de Geofeedia assure que l’entreprise collabore avec « plus de cinq cents » organismes publics de maintien de l’ordre à travers le monde. Et en France ?