Avec l’arrogance à laquelle ils ont habitué la société internationale depuis la fin de la guerre froide et de la période de la bi-polarisation, en s’érigeant comme le « gendarme du monde », en se plaçant sans impunité au-dessus des règles et des principes du droit international public, les Etats – Unis d’Amérique viennent de commettre un acte terroriste en Irak : l’assassinat du Général iranien Kassem Soleimani par un raid effectué à l’aéroport de Baghdad où ce dernier se trouvait.
Pour justifier ce crime, l’Administration américaine, par la voie de son Secrétaire d’Etat, Mike Pompeo, et celle du Président Donald Trump, a prétendu que cette opération a été menée pour éviter, d’une manière préventive, des attaques que les Gardiens de la Révolution iraniens (une branche de l’armée de ce pays) seraient en train de préparer à l’encontre des intérêts américains au Proche – Orient. Cette information leur a été communiquée par leurs services secrets.
Alors que Monsieur Donald Trump, durant sa campagne électorale, avait critiqué et stigmatisé ses prédécesseurs pour avoir ordonné l’invasion de l’Irak, en 2003, en se fondant sur des motifs fallacieux, pour créer le chaos dans cette région du monde, ce qui a d’ailleurs permis l’émergence progressive des groupes islamistes, notamment Daech (en provoquant des zizanies entre les sunnites et les chiites d’Irak), le voilà tomber dans le même piège du President George Bush junior.
En effet, Donald Trump n’est pas arrivé à s’émanciper de l’hégémonie que le lobby sioniste exerce sur la politique étrangère de son pays. Il faut rappeler les deux principaux gages qu’il avait donné à l’AIPAC (le principal lobby sioniste américain, défendant les intérêts d’Israel) afin d’assurer son soutien pour son élection, pour se faire pardonner des malencontreuses déclarations durant sa campagne, jugées comme étant antisémites : d’une part, le transfert de l’ambassade américaine de Tel Aviv à Jérusalem et, d’autre part, la lutte contre l’Iran devenu une puissance incontournable dans la région du Proche et du Moyen – Orient, surtout depuis son intervention en Syrie en s’attaquant aux groupes paramilitaires islamistes takfiristes (Daech et wal Nosra, stipendiés par les services secrets américains et israéliens).
À ce sujet, le candidat Trump s’était laissé emporter dans ses discours de campagne en dénonçant la responsabilité de l’Administration de son pays dans la création de Daech, allant jusqu’à dire : « et je dirai que la co-fondatrice de Daech n’est autre que cette corrompue Hillary Clinton ». D’ailleurs, cette dernière, dans son livre « Hard Choices » avait avoué et dévoilé le projet de l’Administration de son pays de faire émerger l’islam politique pour détruire les structures étatiques et la cartographie du Proche et du Moyen – Orient.
Affaibli et acculé par la procédure de l’impeachment, le Président Trump a cédé à la pression de Tel Aviv qui semble dicter la politique étrangère américaine. Avant le déclenchement de cette procédure, il avait pourtant limogé son plus proche conseiller sur le Moyen – Orient, le Neo-conservateur John Bolton, connu pour sa stratégie du va-t-en-guerre.
De leur côté, les Israéliens se contentent de gesticulations en se lavant les mains de cet acte terroriste commis en violation du droit international pour deux motifs : l’atteinte à la souveraineté de l’Irak et le recours à la force en dehors des cas d’exception prévus par la Charte des Nations Unies. La légitime défense préventive évoquée par eux comme motif de cette agression n’est pas un prétexte admis par la jurisprudence internationale. Cet acte de guerre imputable aux Etats – Unis est ainsi donc illicite et condamnable à la fois en termes de droit et en équité.
Par ailleurs, sur un plan politique, il démontre le marasme israélien de voir l’islamisme ou l’Islam politique échouer, à la fois, grâce à l’intervention de l’Iran ensuite de la Russie, en Syrie. Le projet sioniste a, en effet, besoin des mouvements intégristes et terroristes se revendiquant de l’islam (appelés « islamistes » tout court), voire de l’islam politique dont les fondements et le mode d’action sont calqués sur ceux du judaïsme politique.
Or, le rôle que l’Iran joue, notamment sur le plan militaire, pour faire échouer cette stratégie politique diabolique, en matant les Takfiristes, remet en cause les projets sionistes qui cherchent à la fois le chaos, en remettant en cause les structures étatiques, ainsi que l’émergence de groupes instrumentalisant la religion à des fins politiques à l’instar du sionisme, en vue de changer la cartographie du Moyen – Orient avec des conséquences escomptées sur le continent européen voisin : un flux migratoire en raison des troubles sécuritaires mais aussi des conséquences économiques et financières engendrées par ces conflits.
L’assassinat du General Soleimani va-t-il conduire à un nouveau scénario conflictuel chaotique ? Tout dépendra de la réaction de la Russie. Notre pays a semblé mieux comprendre la donne au Proche et au Moyen – Orient, depuis le début du mandat d’Emmanuel Macron qui, en toute objectivité et nonobstant nos critiques les plus vives de sa politique interne, tente de redresser notre politique étrangère en s’ouvrant sur la Russie et en sauvegardant un équilibre diplomatique, dans le respect de nos traditions légalistes en matière de politique étrangère fondées sur le respect des normes et des principes généraux du droit mais aussi, comme Bainville le soulignait, sur la sauvegarde de nos relations naturelles avec nos partenaires historiques.
Elie HATEM