La bataille engagée il y a cinq mois contre les jihadistes affiliés au groupe État Islamique qui avaient pris le contrôle de quartiers entiers de Marawi est terminée, a affirmé le gouvernement philippin le 23 octobre. Cette fin des combats vient apaiser les craintes de l’établissement d’une base durable de l’État Islamique dans la plus grande ville musulmane de l’archipel à majorité catholique. Mais les inquiétudes demeurent quant à la menace que constitue toujours ce groupe dans le sud du pays.
« Nous annonçons la fin de toutes les opérations de combat à Marawi », a annoncé à la presse le ministre philippin de la Défense Delfin Lorenzana en marge d’une rencontre sur les questions régionales de sécurité à Clark, dans le nord des Philippines. « Il n’y a plus de combattants dans Marawi », a-t-il assuré.
On se souvient qu’en novembre 2016, l’énergique président des Philippines, Rodrigo Duterte, avait averti que les jihadistes de l’État Islamique chassés de Syrie et d’Irak pourraient tenter de s’installer dans son pays. Connu pour son franc-parler et ses décisions tranchées mais efficaces contre le trafic de drogue, il avait alors prévenu que les droits de l’homme ne s’appliqueraient pas à eux afin de protéger sa population :
« Rappelez-vous, ces types, ils n’ont pas un iota d’idée de ce que sont les droits humains, croyez-moi. Je ne vais pas simplement laisser mon peuple se faire massacrer au nom des droits de l’homme, c’est de la connerie. »
Et le 23 mai 2017, des centaines de jihadistes ayant prêté allégeance au groupe islamo-terroriste avaient pris le contrôle de secteurs entiers de Marawi, utilisant des civils comme boucliers humains. Rodrigo Duterte avait décrété la loi martiale dans la province méridionale de Mindanao suite aux affrontements entre l’armée et les jihadistes. En cinq mois, 920 d’entre eux appartenant au groupe Maute opérant aux Philippines et se désignant également sous le nom d’État islamique de Lanao, ont été tués, ainsi que 165 militaires et 47 civils, selon le gouvernement. Plus de 400 000 personnes ont fui la ville dont certains quartiers ne sont plus qu’un champ de ruines après avoir été pilonnés quasi quotidiennement par des frappes aériennes.
Le président Rodrigo Duterte avait déjà proclamé que Marawi est « libérée de l’influence des terroristes ». Cette annonce était intervenue au lendemain de la mort du chef de l’État Islamique pour le Sud-Est asiatique, le Philippin Isnilon Hapilon qui se faisait appelé Abou Abdallah al-Filippini.
Isnilon Hapilon, qui figurait sur la liste américaine des « terroristes les plus recherchés », avait été tué en même temps qu’Omarkhayam Maute, chef du groupe islamiste Maute, selon l’armée. Le président Duterte, comme les analystes, présentaient Hapilon comme « l’émir » régional de l’État Islamique et le principal artisan de son projet d’y décréter un califat, alors que le groupe subit des revers en Irak et en Syrie. Il avait en effet fait allégeance à l’État Islamique un mois après sa création en 2014 et il était alors désigné par le groupe terroriste islamique comme « combattant autorisé à commander les soldats de l’État islamique des Philippines ».
Les origines des affrontements remontent à une opération du 23 mai destinée à capturer Hapilon, recherché depuis des années comme chef d’Abou Sayyaf, groupe islamique spécialisé dans les enlèvements et meurtres d’occidentaux, puis comme chef régional de l’État Islamique. De violents combats avaient éclaté à Marawi lorsque l’armée philippine avait lancé un raid contre une maison soupçonnée de lui servir de cache. Les soldats étaient alors tombés sur un groupe de « soldats du califat », bien plus nombreux que prévus, qui préparaient une attaque contre Marawi pour le 26 mai, jour de l’ouverture du ramadan.
Hapilon avait forgé une alliance avec le groupe des deux frères Maute, à la tête d’un réseau islamiste local, et peaufinait depuis des mois la prise de Marawi. La tentative de capturer Isnilon Hapilon s’était soldée par un échec et elle avait incité les jihadistes à précipiter leur attaque contre la ville.
Le chef de l’armée Eduardo Ano a expliqué aux journalistes que quelques jihadistes résiduels sont encore retranchés dans « deux bâtiments dont une mosquée ». « C’est là que les derniers combats ont eu lieu, là que nous avons libéré 20 otages », a dit le général. « Nous avons donné aux militants et terroristes la possibilité de se rendre, mais ils ont choisi de se battre jusqu’à leur dernier souffle. Les corps de 42 insurgés ont été récupérés à l’issue de l’ultime bataille. Deux femmes et cinq étrangers figuraient parmi eux. »