L’AGONIE politique d’un président godelureau, dévalué pour avoir avili la fonction présidentielle par ses exhibitions répétées avec des transsexuels et des voyous ethniques de bas étage à l’été 2018, ne devrait pas se prolonger indéfiniment. Sauf si l’essoufflement apparent du mouvement des gilets jaunes devait se confirmer. Sauf si les petites et grandes manœuvres politiciennes qui se profilent, aboutissent aux résultats escomptés, à savoir passer ce mauvais cap des tempêtes populaires pour retrouver la mer des Sargasses de la mondialisation heureuse. Autrement dit, un monde reconstruit au service exclusif des nouvelles féodalités oligopolistiques qui couvrent désormais la planète d’un maillage de plus en plus serré.
Le petit sire Macron, sûr de lui et dominateur (à l’instar de ses maîtres d’outre-Manche), s’est cru habilité par un suffrage populaire éhontément et institutionnellement truqué (son écrasante majorité à la chambre ne représentant que 15,5% des inscrits) à déconstruire la France à marche forcée selon le plan de formatage imposé par l’Unification économique mondiale, un messianisme qui ne dit pas son nom ! Aujourd’hui, depuis cinq longues semaines, débordé par une situation qu’il a lui même provoquée (et dont il n’a pas uniquement hérité quoi qu’il en dise), Macron essaie d’éviter à tout prix une chute ignominieuse dans le fracas d’une fronde populaire que les autorités ne sont pas parvenues à discréditer en lâchant les chiens de garde de l’orthodoxie sociale-libérale-libertaire que sont les Black blocs et les racailles de la Grande Ceinture.
Des événements qui resteront dans la mémoire vive des Français, devenus pour l’occasion les cibles des tirs à intentions meurtrières des Flash-Ball (lanceur de balles de défense) utilisés par les forces de police (les brigades anti-criminalité, dit-on). Des armes en principe sublétales (mais authentiquement vulnérantes), qui ont été au cours des ces cinq samedis de colère utilisées à tir tendu visant spécifiquement les visages des manifestants comme en attestent les nombreuses images prises aux cours de ces samedis insurrectionels. Plusieurs d’entre eux ont ainsi, semble-t-il, perdu un œil, mais curieusement la presse habituellement si prolixe lorsqu’il s’agit d’atteintes aux signes d’identité confessionnelle de telle ou telle minorité prétendument française (mais de très fraîche date), reste formidablement muette sur les blessés, les énucléés, les estropiés (mains arrachées par des grenades de désencerclement), toutes victimes d’une authentique volonté de blesser voire de tuer.
À cette échelle du non vu depuis la répression par les socialistes (SFIO) Jules Moch (ministre de l’Intérieur) et Daniel Mayer (ministre du Travail) des grèves insurrectionnelles des houillères du Nord du 4 octobre au 29 novembre 1948.
IL NE FAUT PAS oublier que Macron, bien qu’il se soit efforcé dans son adresse à la nation le lundi 10 décembre au soir, de faire porter sur ses prédécesseurs la responsabilité de ses propres fautes et de l’actuel délabrement du pays profond — « Ce sont quarante années de malaise qui ressurgissent » — est de facto l’héritier, le fils puîné, des quatre chefs de l’État qui l’ont devancé et par conséquent leur continuateur, et dans le cas de Mitterrand, son exécuteur testamentaire. Le radsoc Chirac subclaquant compris ! Et puis n’a-t-il pas été le ministre chéri de Hollande, non ?
Soulignons à ce propos que la lame de fond des gilets jaunes n’est bien entendu pas uniquement revendicative. Le dire, c’est enfoncer une porte ouverte. Elle dépasse, et de très loin, les seules questions du pouvoir d’achat, du prix du carburant et des fins de mois difficiles. Elle est aussi et surtout en effet l’expression d’un profond malaise sociétal induit par quatre décennies dévastatrices de socialisme parasitaire. Toutefois le mal vient de plus loin, c’est indéniable. Notamment avec la permanence d’une chimère toujours renaissante depuis la nuit des temps, celle qui promet aux croyants et aux jobards des lendemains qui chantent, sans larmes ni sueur. Phantasme qui s’est donné libre cours après le 10 mai 1981 sous ses deux espèces complémentaires : le pillage des caisses de l’État et des ressources du pays associé à un sectarisme idéologique (le politiquement correct) inédit. Tyrannie consensuelle et terrorisme intellectuel dont l’emprise continue à s’accentuer sur la société au fur et à mesure de la progression du social-libéralisme sous ses trois espèces que sont la mondialisation, l’américanisation et la tiers-mondisation. Trois moments, trois aspects d’un seul et même monothéisme molochien, avons-nous dit, soit la fusion des peuples atomisés en monades consuméristes au sein d’un magma planétaire, chaos culturel, sentines génétiques, uniformisation et interchangeabilité pour tous.
C’EST BIEN ce que nous annonce et nous promet le Pacte de Marrakech (“Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières” signé honteusement par la France le 10 décembre dernier), qui s’articule entre autres, sur une super-loi Fabius-Gayssot destinée à museler toute liberté d’expression sur les continents habités… sous couvert (objectif 17) de lutte contre le racisme dont les migrants pourraient être l’objet. Les pauvres ! Il est à ce titre question de « recadrer le discours sur la migration, pour qu’il cesse de véhiculer des idées trompeuses ou faussées et donne une image exacte de l’importance que revêt la migration et du rôle positif qu’elle peut jouer dans le monde actuel »… Il s’agira en outre « de promouvoir au niveau étatique les reportages indépendants et objectifs, de sensibiliser et d’éduquer les professionnels des médias » en leur imposant des critères et des grilles terminologiques ainsi que des « standards [normes] éthiques ». Faute de quoi les médias s’exposent à des sanctions pécuniaires (suppression des subventions), voire judiciaires pour ceux qui feraient « la promotion de l’intolérance, de la xénophobie, du racisme et d’autres formes de discrimination envers les migrants ».
Tous les despotismes, et les plus durs, commencent par réduire le peuple au silence. Et c’est que ce que l’on a vu après les élections législatives à la proportionnelle de mars 1986 qui ont acté la déconfiture de la Gauche. Deux ans après, tout était rentré dans l’ordre et le système parlementaire se trouvait verrouillé pour les trente années qui suivirent excluant du débat démocratique un gros tiers du corps électoral. À présent se sont des lois relatives aux fake news qui visent à contrôler toujours plus étroitement les réseaux sociaux et la Toile, et partant, nos modes de penser en général, cela en complément de l’évolution des algorithmes censeurs par prédestination.
Il est de ce point de vue emblématique que le point 5 relatif à l’immigration ait été éliminé de la concertation dans le cadre du fameux “dialogue” de six mois entre le gouvernement, les instances politiques et la société civile, destiné à apaiser les actuelles tensions sociales et comme par hasard inauguré le 16 décembre, alors que la décrue du mouvement des gilets jaunes n’était encore qu’une hypothèse de travail ! Immigration/migration qui pourtant devrait se trouver au cœur du débat. Car pour sortir de l’imbroglio budgétaire dans lequel se débattrait (soi-disant) notre malheureux gouvernement pris qu’il serait entre le marteau des revendications populaires et l’enclume de l’impérieuse nécessité d’une réduction de la dépense publique, nul ne semble songer un instant qu’il suffirait (une possibilité parmi de nombreuses autres) de limiter substantiellement notre « généreux accueil » de migrants pour voir réduit d’autant notre déficit de quarante à cinquante milliards, montant qui ne serait pas à ponctionner sur les salaires ou les retraites comme le gouvernement en avait l’intention initiale.
POUR CEUX qui n’auraient pas encore saisi, ce prétendu dialogue sur une demi-année, panacée pour sortir de la crise, n’est qu’un os à ronger lancé au “populo” et un moyen de gagner du temps en escomptant la lassitude, puis à terme, l’épuisement du mouvement. Tout est fait pour jouer la montre et l’attentat de Strasbourg, intervenu à point nommé malgré les mesures de sécurité extrêmes prises aux abords du marché de Noël (et autres points de contrôle que le terroriste a curieusement traversés sans encombre bien qu’armé !) a très opportunément soufflé la flamme de la colère populaire. Beaucoup de questions se posent d’ailleurs sur cet attentat providentiel pour l’Exécutif survenu à l’heure de plus grande écoute, vers 20 heures, en prime time, et largement répercuté par toutes les chaînes au détriment du mouvement des gilets jaunes ; comme si l’on voulait opposer le croissant au gilet, le vert au jaune, ou pour mieux dire éclipser le jaune par le vert, détourner la colère des Français appauvris, surtaxés, dépossédés de l’Etat vers un Islam violent et ennemi de l’Occident, leur faire peur pour qu’ils cessent de manifester, de défiler, de revendiquer et qu’ils rentrent sagement à la niche après avoir reçu quelques misérables miettes.
Comme toujours ou presque dans ce genre d’événements terroristes, il s’agit d’un fiché S d’origine maghrébine, bien que né en France, en l’occurrence à Strasbourg, parfaitement connu des services de renseignement, considéré comme un « islamiste radicalisé ». Comme toujours ou presque, il s’agit d’un multirécidiviste ayant déjà accompli de nombreux séjours en prison mais ayant été à chaque fois libéré, c’est, d’ailleurs, nous dit-on, au cours d’un de ces séjours derrière les barreaux qu’il se serait radicalisé, selon l’expression désormais consacrée. Comme toujours ou presque, à peine l’attentat est-il commis que les télévisions nous disent que le profil du terroriste est parfaitement connu, que l’on sait son nom, son âge, son passé, de même que quelques minutes après l’effondrement des tours du World Trade Center en 2001 à New York on savait que le cerveau de l’attentat était Oussama Ben Laden et on connaissait les noms et photographies des terroristes ! Comme toujours ou presque, et c’est une constante depuis l’affaire Merah en 2012, le terroriste, parfaitement connu de la DGSI, est tué à la suite d’une course-poursuite tenant haletant le téléspectateur de sorte qu’il ne peut jamais s’expliquer sur les raisons de son geste, ni être jugé par une cour d’assise et que personne ne peut plus lui poser de questions dérangeantes.
DE la même façon le pouvoir cherche à diriger les gilets jaunes vers une voie de garage, celle du référendum d’initiative citoyenne (RIC) dont la mise en place, si elle était décidée, demanderait des années pour évidemment à l’arrivée ne jamais voir le jour (mais qui existe déjà depuis 2008 dans la Constitution [alinéas 3 à 6], inapplicable par nature comme de bien entendu, ce dont la presse vint tout juste de s’apercevoir ; un référendum d’initiative partagée dont les conditions sont à ce point grotesques qu’en parler est une insulte à l’intelligence) parce que l’on nous dira par exemple qu’il est incompatible avec le Traité de Lisbonne.
Une autre bonne façon de gagner du temps et de mettre définitivement l’éteignoir sur les braises de la colère populaire.
Les pseudo-élites qui croient nous gouverner, confites dans leur morgue et leurs ignorances, se sont mises en tête que les Français bovinisés, gavés d’hormones télévisuelles, ayant été élevés hors sol comme des veaux de batterie dans les usines à formatage idéologique que sont devenues les écoles de la Républiques, n’étaient plus capables de réaction, abrutis et avachis qu’ils étaient dans et par l’opulence consumériste spectaculaire. Mais voilà, ces « bœufs de Céfrans », quand l’ensilage vient à manquer, peuvent encore devenir furieux et, pire, s’enrager jusqu’à vouloir des têtes au bout des piques.
Au lieu de se gaver de psychanalyse, notre intelligentsia aurait mieux fait de lire Le Bon avant de se précipiter pour signer des deux mains le pacte de Marrakech conçu pour achever le grand métissage visant à effacer définitivement les vertus primitives de nos vieux peuples. La vague soixante-huitarde, ultralibérale et libertaire, qui en mai 1968 avait balayé les caciques de l’alliance gaullo-communiste de 1944, est apparemment parvenue à son terme en venant se briser sur le socle — déjà entamé mais non encore totalement détruit — des invariants ethnoculturels, confessionnels et historiques de la nation française.
RESTE QUE l’incroyable surdité et l’ahurissante cécité de nos pseudo-élites confinent indubitablement à l’autisme puisqu’elles n’ont rien vu ni entendu ni compris du grondement profond qui montait depuis bien longtemps des entrailles d’une nation soumise à d’iniques pressurages de nature à susciter des enragés. Bas les masques : la bobocratie cosmopolite que l’on croyait être acquise à toutes les grandes causes humanitaires (sans-papiers, sans-logis, racailles sans foi ni loi ou plus exotiques, tels les Rohingyas), d’un seul coup et d’un seul, montre son vrai visage, celui d’une haine épaisse, visqueuse à l’égard des petites gens de la “franchouille”. Quelle surprise, les humanistes n’aiment pas les gens de leur propre pays. Il est vrai qu’il n’en n’ont pas (de patrie) et vivent à longueur d’années dans ces no man’s land que sont les halls d’aérogares. On comprend mieux que dans la France des oubliés et des méprisés, l’on passe finalement d’une simple grogne récurrente et souterraine à une insurrection sans concession.
[…]
Léon CAMUS et Jérôme BOURBON
Editorial du numéro 3357 de RIVAROL daté du 19 décembre 2018.