Nous proposons ci-dessous la traduction rapide d’un article de Jean Pühse, le responsable pour les affaires étrangères du NPD (Parti national-démocrate d’Allemagne, Nationaldemokratische Partei Deutschlands), qui fait face à une nouvelle tentative d’interdiction du Système.
Le NPD peut-il être interdit ?
Une explication sur une affaire vraiment unique dans l’UE
Pendant environ un an et demi, le Parti national-démocrate d’Allemagne a été confronté à la possibilité d’une nouvelle attaque contre son existence légale, réalisée par la plus haute cour fédérale d’Allemagne. Une telle possibilité a déclenché une nouvelle vague d’intenses discussions dans la classe politique, dans les médiats, et dans une certaine mesure parmi la population allemande, quant à la validité d’une telle entreprise.
L’objectif des forces politiques établies en Allemagne est que la Cour constitutionnelle, basée à Karlsruhe, déclare que le NPD s’oppose fondamentalement, est hostile à la Constitution allemande. Un parti politique en Allemagne ne peut être déclaré hostile à la Constitution, que si ce parti se retourne contre l’ordre démocratique établi, comme cet ordre a été légalement établi par la République fédérale.
Les obstacles juridiques à l’interdiction d’un tel parti politique sont importants. Un parti politique ne peut être interdit en Allemagne que s’il peut être prouvé que les activités de cette organisation sont violentes dans le but de renverser l’ordre politique actuel. En d’autres termes, la simple expression programmatique de rejet du système démocratique d’un parti politique n’est pas un motif suffisant pour que cette organisation soit légalement proscrite du système politique.
En conséquence, deux fois seulement dans l’histoire de la République fédérale, depuis sa fondation en 1949, des partis politiques ont été interdits. La première fois en 1952, quand le Parti – à vocation nationale – socialiste du Reich (SRP, Sozialistische Reichspartei) fut interdit, et la deuxième en 1956 avec le Parti communiste d’Allemagne (KPD, Kommunistische Partei Deutschlands).
En 2003, les forces politiques d’Allemagne ont tenté d’imposer une interdiction similaire contre le NPD. Cependant, la tentative a échoué. Une des raisons pour lesquelles elle a échoué, c’est que les charges (i. e. les forces politiques) dépendaient trop fortement des informateurs du NPD, en d’autres termes, elles dépendaient de membres du NPD auxquels avait été offert une rémunération financière pour dénoncer leurs collègues. Cette opération clandestine était (et est toujours) réalisée par un département spécial au sein du ministère allemand de l’Intérieur. Ce département est responsable de la protection de la Constitution allemande et de veiller à ce que l’électorat du pays n’aille pas trop loin dans ses opinions politiques. Quand il dut être prouvé que le NPD était agressif, hostile dans ses actions contre la Constitution allemande, le caractère suspect de ces informateurs, et probablement leurs opinions politiques suspectes également, fut définitivement fatal à la cause du gouvernement.
Il est intéressant de noter qu’il n’existe dans aucun autre pays européen une autorité comparable, qui serait chargée de « la protection de la constitution », de la même manière que le ministère allemand de l’Intérieur a mis au point son propre département « Protection-constitutionnelle » interne.
Peu prometteur – telles sont les perspectives d’une nouvelle tentative pour interdire le NPD
En conséquence de la précédente tentative d’interdiction du NPD (présenté à la Cour constitutionnelle en 2001 et rejetée en 2003), le ministère de l’Intérieur allemand a cette fois décidé de ne pas utiliser les informateurs du NPD dans les poursuites. Au lieu de cela, il a dit qu’il attendait que soient introduite des sources dites « non-viciées », sources qui viennent sans doute directement des citations et des déclarations faites par le NPD lui-même.
L’année dernière, le ministre de l’Intérieur a présenté une collection complète de documents, qui sont censés servir d’arguments alternatifs pour une tentative d’interdiction du NPD. Cela pourrait signifier que la Cour, conformément à sa décision prise en 2003, considérera ces éléments de preuve comme insuffisants s’agissant de prouver l’hostilité du NPD à la Constitution allemande.
C’est l’une des principales raisons pour lesquelles, en dépit des appels répétés par les médiats, et par les politiciens, et par le Bundesrat (la chambre haute qui représente les 16 États provinciaux), le gouvernement actuel, représenté par l’administration d’Angela Merkel a été réticent à soutenir une nouvelle initiative juridique tendant à une interdiction du NPD.
En effet, il est évident pour beaucoup que le risque qu’une autre tentative d’interdiction du NDP échoue est élevé ; entre autre parce que :
-Le NPD ne fait rien d’illégal ;
-Il participe légalement à la vie politique de la République fédérale ;
-Il a régulièrement déclaré qu’il n’avait pas l’intention d’agir en dehors de la loi du pays et/ou de la constitution ;
-Et il a toujours affirmé qu’il rejette l’utilisation de la force dans la vie politique.
Le NPD prend l’initiative – une action qui s’oppose à la proposition d’interdiction
Le débat public récurrent d’une éventuelle interdiction met le NPD en position désavantageuse s’agissant de réaliser ses objectifs politiques. En effet, la proposition toujours répétée agit presque comme une interdiction de facto du parti. Dans le discours public, le NPD est pour tout cela victime de discrimination, puisque autant sa réputation que ses perspectives électorales sont constamment et délibérément diffamées.
En conséquence, le NPD est entravé dans ses efforts visant à influencer le débat politique, de la même manière que les autres partis politiques cherchent à influencer ce débat. Ce qui est certainement contraire aux intentions de la constitution allemande.
Par conséquent, il est clairement dans l’intérêt du NPD d’obtenir une décision claire sur la question de savoir si ce parti politique est ou non hostile à la constitution. En conséquence, et avant qu’une proposition visant à interdire le NPD ne soit déposée par le ministre de l’Intérieur ou tout autre entité politique, le parti a lui-même déposé une demande (le 12 novembre 2012) et cette question devrait être jugée dans de brefs délais. C’est ce qu’on appelle la « contre-pétition », une demande qui est une première dans l’histoire juridique de la République fédérale.
En déposant une telle « contre-pétition » devant les tribunaux allemands, le NPD bien sûr ne cherche PAS à être interdit. Il recherche une décision définitive, qui une fois adoptée, montrera que le NPD n’est pas hostile à la constitution, et ne peut donc pas être interdit.
Cette action ne doit pas être considérée comme un simple « coup de publicité » (comme cela a été insinué par certains adversaires du NPD). Elle doit être considérée comme un acte politique et juridique efficace qui vise à lutter contre la discrimination politique. Un objectif a de fait déjà été atteint. En déposant cette demande à Karlsruhe le parti a – comme suggéré par la réaction du public – pris l’initiative politique et placé la balle dans le camp de l’adversaire. Si et lorsque le Bundesrat, ou tout autre organe politique, fera une demande juridique à la Cour constitutionnelle pour l’interdiction du NPD, alors il apparaîtra que l’Establishment ne fait que réagir aux mouvements déjà effectués par le NPD.
Comment cela va-t-il se finir ?
Comme la Cour constitutionnelle a rejeté la demande du NPD d’avoir une déclaration officielle quant à savoir si le parti est hostile ou non à la Constitution allemande, le parti va faire appel à la Cour européenne des droits de l’homme. L’objectif de cet appel sera de produire une décision judiciaire qui atteste le fait que le NPD est en effet en conformité avec la Constitution allemande.
Peu importe où ce cas sera jugé – que ce soit à Karlsruhe ou à la Cour européenne des droits de l’homme – le NPD est très confiant quant à une issue favorable. Selon la règle de droit en Allemagne, et comme prévu dans la constitution du pays, une interdiction ne peut pas être appliquée contre le NPD. Cependant si le plus haut tribunal du pays cédait à la pression des partis politiques du système, et jugeait qu’une interdiction est juridiquement possible, alors il est fort probable que cette décision serait annulée par la Cour européenne des droits de l’homme, parce que cette juridiction possède des critères beaucoup plus stricts concernant l’interdiction des partis politiques que ceux qui existent en Allemagne.
Les dégâts politique pour ceux qui préconisent l’interdiction du NPD seraient considérables. Ils seraient tenus d’attester devant un tribunal européen qu’ils ont traité le NPD comme n’étant pas en conformité avec les principes de l’État de droit allemand. La réputation internationale de l’État de droit allemand serait dans ce cas être gravement touchée. Les partisans d’une nouvelle tentative d’interdiction du NPD devraient donc sérieusement considérer s’ils veulent ou non prendre ce risque.