Des régions à dimension européiste
Après plusieurs mois de comédie parlementaire, les députés ont voté hier la réforme territoriale de la France. La nouvelle carte compte 13 régions. Au moment du vote, les bancs étaient clairsemés : les députés PS ont largement voté pour, alors que le reste des députés, de l’extrême gauche (Front de gauche et Europe écologie-Les Verts) à l’extrême droite en passant par l’Union des démocrates et indépendants (UDI), l’Union pour un mouvement populaire (UMP) et les radicaux de gauche se prononçait contre.
Les nouvelles régions seront conformes aux diktats européistes – François Hollande s’était vanté de vouloir des régions à « taille européenne » dans un discours le 2 juin 2014 (même si leur incompétent président à la dérive évoquait alors 14 régions…) – visant à affaiblir les nations européennes en privilégiant des régions suffisamment fortes pour être un contrepoids aux États, mais pas assez pour s’opposer ni à l’UE, ni aux financiers internationaux.
Les parlementaires ont déjà commencé cette semaine la nouvelle phrase des travaux de la réforme territoriale. Les sénateurs travaillent sur la redistribution des compétences entre les régions, nouvelles et anciennes, et les départements. L’objectif de départ du gouvernement était de supprimer les conseils généraux. Mais François Hollande a reculé devant les menaces des radicaux de gauche. Le gouvernement veut désormais vider autant que possible de leur substance les nouveaux conseils départementaux, au profit, au niveau inférieur, des communautés d’agglomération, et, au niveau supérieur, des régions.
Plusieurs changements induits par la réforme (fusion de l’Alsace avec la Champagne-Ardenne et la Lorraine, fusion du Nord-Pas-de-Calais avec la Picardie, et fusion du Languedoc-Roussillon et de Midi-Pyrénées) demeurent contestés, tout comme pourraient l’être le choix des futures capitales régionales (Rouen et Caen en Normandie et Toulouse ou Montpellier en Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées), autant par des Français en province que sur le terrain politique : l’UMP a déjà annoncé le dépôt de recours devant le Conseil constitutionnel.
Une flexibilité relative
Si les revendications sont si fortes, c’est que l’existence d’une région est le préalable à toutes les modifications que la loi permet. Les départements auront, entre 2016 et 2019, la possibilité de changer de région. Les députés ont supprimé la condition du référendum local ; les changements seront possibles si le conseil départemental (ex-conseil général) et les deux conseils régionaux concernés (celui de « départ » et celui « d’arrivée » du département) sont d’accord. L’assemblée départementale devra obtenir un vote favorable avec plus de 60 % des voix.
Par exemple, plus des trois cinquièmes des futurs élus du conseil départemental de Loire-Atlantique devront se prononcer pour le rattachement de leur département à la région Bretagne pour que celui-ci soit possible. Il faudra ensuite que la région Bretagne accepte ce département supplémentaire et que, surtout, la région consente à « perdre » un département.
Ces conditions peuvent laisser présager d’intenses batailles politiques voire politiciennes selon les résultats des élections régionales, qui devaient se dérouler en mars 2015, en même temps que les élections départementales, et que les députés ont repoussées à décembre 2015.