L’Autorité de la concurrence (AC) a dénoncé dans un rapport la « défaillance » de l’État qui a livré les autoroutes françaises à des groupes industriels mafieux qui les exploitent comme des « rentes ». L’AC a contrôlé les sept sociétés concessionnaires d’autoroutes, dirigées par les trusts français Vinci et Eiffage et espagnol Abertis.
« [Ils] affichent tous une rentabilité nette exceptionnelle, comprise entre 20 % et 24 %, nourrie par l’augmentation continue des tarifs des péages. Et cette rentabilité n’apparaît justifiée ni par leurs coûts ni par les risques auxquels elles sont exposées »
dénonce le rapport qui propose treize recommandations à l’État.
Ce rapport, comme les précédents, restera sans doute sans suite. Les complicités mafieuses entre les plus hautes autorités de la République et les trusts permettront que le système de racket mis en place avec la gestion privée des autoroutes perdure.
Il y a plusieurs mois, la Cour de comptes avait déjà – encore – dénoncé ce système scandaleux.
« Le ministère chargé des transports ne négocie pas avec les sociétés concessionnaires d’autoroutes dans un cadre lui permettant de disposer d’un rapport de force favorable. […] La sous-direction compétente de la DGITM négocie quasiment seule, dans un cadre peu formalisé (faiblesse du substrat réglementaire, mandat de négociation non systématique, suivi interministériel et validation sporadiques des étapes de négociation). Le ministère de l’Économie et des Finances n’est généralement pas associé aux négociations. Or, la DGITM doit traiter avec des sociétés puissantes, adossées à de grands groupes, de BTP en particulier, pour lesquels les négociations concernant le secteur autoroutier s’inscrivent dans un cadre plus large avec de forts enjeux. Le rapport de force apparaît plus favorable aux sociétés concessionnaires, et ne retrouve un certain équilibre que lorsque le ministère des Finances est associé aux négociations.
En outre, les deux seuls organes consultatifs que sont le comité des usagers du réseau routier national et la commission nationale des marchés des sociétés concessionnaires d’autoroutes et d’ouvrages d’art ne jouent pas pleinement leur rôle. En particulier, la commission des marchés ne fait, en pratique, pas usage des réels pouvoirs d’investigation et de publication qui sont les siens. »
rappelait la Cour, qui épinglait durement le ministère :
« Le ministère chargé des transports assure ainsi le suivi des obligations des sociétés concessionnaires, mais sans toujours tirer les conséquences du non-respect des obligations de ces dernières. […] L’État ne se montre pas assez exigeant en cas de non-respect de leurs obligations par les concessionnaires, qu’il s’agisse de préserver le patrimoine, de respecter les engagements pris dans les contrats de plan ou de transmettre les données demandées par le concédant. Il met rarement en œuvre les instruments contractuels dont il dispose (possibilité de mise en demeure et de pénalités) et ne subordonne pas la négociation des contrats de plan au respect par les concessionnaires de leurs obligations contractuelles de “base”.
Dans un autre point, la Cour évoquait le total abandon des usagers aux financiers :
« Le cadre juridique relatif aux tarifs n’offre pas aujourd’hui une protection suffisante aux intérêts du concédant et des usagers. En l’absence de contrat de plan, le décret de 1995 relatif aux péages autoroutiers garantit aux sociétés concessionnaires une hausse annuelle minimale des tarifs de 70 % de l’inflation mesurée par l’indice des prix à la consommation (hors tabac). Les hausses observées sont nettement supérieures à ce seuil. […] L’État a accepté de compenser par des hausses de tarifs un grand nombre d’investissements de faible ampleur, dont l’utilité pour l’usager n’était pas toujours avérée, ou qui relevaient des obligations normales des concessionnaires. L’État a par ailleurs très peu mis en œuvre le dispositif lui permettant de récupérer l’avantage financier découlant des hausses de péage déjà perçues, lorsque les investissements concernés sont retardés. »
Dans un cinquième point, la situation apparaissait encore totalement favorable aux multinationales et doublement défavorable aux Français, car l’étant pour les usagers et pour l’État.
« Le modèle financier du ministère chargé des transports calcule les hausses tarifaires de base sur des hypothèses macroéconomiques qui sont souvent à l’avantage des concessionnaires, notamment celles relatives aux perspectives d’évolution du trafic ou des charges de personnel. […] Enfin, les taux de rentabilité retenus lors de la négociation tarifaire récente sont nettement plus élevés que ceux négociés dans le cadre du Paquet vert et que ceux proposés par les services du ministère chargé des transports. Ils sont supérieurs à 8 % pour COFIROUTE, ESCOTA, ASF, APRR, de 8,08 % pour APRR, à comparer au taux de 6,7 % avancé par les administrations en début de négociation. »
Enfin, la Cour évoquait les véritables escroqueries réalisées par les sociétés autoroutières :
« Les hausses tarifaires prévues dans les contrats de plan ont été mises en place de façon anticipée dès la signature du contrat par la société concessionnaire, parfois deux ans avant l’approbation par décret en Conseil d’État et la signature de l’État. Cette anticipation crée une insécurité juridique et réduit les marges de négociation de l’État pour finaliser les clauses non tarifaires du contrat de plan. »
La situation ne changera pas après la parution de ce énième rapport : l’amoureux du grand patronat Manuel Valls continuera à pressurer les Français par les impôts injustes, pour financer en bas l’invasion de la France, en haut l’oligarchie criminelle et le parasitage généralisé de la France.